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Madifing Diané, gouverneur de Labé: «le président Macron est victime de sa précocité…»

La sortie du président français, Emmanuel Macron, relevant un doute sur la sincérité des résultats de l’élection présidentielle du 18 octobre en Guinée, ne fait pas que des heureux. Si l’opposition jubile toujours après cette sortie, des voix commencent à s’élever du côté du pouvoir pour fustiger ce que certains qualifient d’ingérence. Le gouverneur de la région administrative de Labé, fief de l’opposition où un drapeau français a même été aperçu dans une manifestation d’opposants, a abordé ce sujet au micro d’une journaliste de Guinee114.com.

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De mon point de vue, le président Emmanuel  Macron est victime de sa précocité dans la politique. C’est un électron libre qui s’est vue au-devant de la scène politique française. À regarder son âge, à voir son parcours pour cette présidence, il doit être considéré comme quelqu’un sans expérience parce que parler de la vie politique de la Guinée par rapport à un président qui est né vingt ans après l’indépendance de notre pays, c’est un exercice très difficile mais aussi simple.

Ses grands-pères qui ne sont même pas de la génération de son père, ont eu à faire à la Guinée. La politique française à l’endroit de la Guinée est basée pas seulement sur un rejet de la Guinée mais aussi sur une mésentente de ce qu’est la Guinée. La Guinée a toujours voulu travailler avec la France.

Nous avons eu l’indépendance en 1958, les vingt-six années du président Sékou Touré ont été animées par un rejet total du régime guinéen  et de son chef. Nous nous sommes installés dans toutes les agitations politiques de l’époque. Ces vingt-six années passées, la page qui nous intéresse c’est la prise du pouvoir par le Colonel Lansana Conté. Ces jeunes militaires ont mis l’espoir dans la France pour ne pas dire qu’ils se sont même déplacés pour offrir la Guinée à la France.

La France est entrée en Guinée avec force mais avec un esprit de vengeance sur les années d’indépendance. La Guinée s’est tellement offerte à la France qu’on avait à la présidence un certain Vatrican, conseiller personnel et principal du président Lansana Conté et qui avait droit de discuter de toutes les questions. À la Banque Centrale, nous avons installé un certain Léon Cheize. Mais le résultat de cette période est des plus catastrophiques.

Tout l’héritage économique laissé par le premier régime plus de trois cent cinquante (350) unités industrielles ont été jetées à l’eau par le conseil de ces conseillers français. Tous les hauts cadres de l’administration ont été rejetés par manque de formation à leur avis. Ils nous ont fait même retirer notre monnaie nationale pour nous installer dans le franc. Mais le ridicule est que la vengeance n’a été que la catastrophe. Au lieu de nous ramener au meilleur sentiment de collaboration et de coopération, ça amené le pays dans les difficultés les plus aiguës.

La Guinée a fait de meilleurs efforts pour renouer ses relations avec la France par la disponibilité des dirigeants de cette époque qui ont vu offrir la Guinée à la France. C’était une opportunité pour la France de nous venir en assistance, de corriger ce qui était à corriger dans cette politique passée. Mais ils ont jeté le bébé et le bain du bébé, ils se sont installés dans leur appréciation : tout ce qui a été fait de la période de l’indépendance jusqu’à ce jour était à jeter à l’eau pourtant il y avait de très bons dedans (….)

À regarder aujourd’hui ce jeune président, qui  ne connaît pas les relations de la Guinée par rapport à la France, qui ne connaît pas la géopolitique africaine, qui est un électron libre dans sa politique, dans sa vision, qui se jette sur des questions essentielles pour trancher une vision personnelle sur un état souverain comme la Guinée, je pense que nous n’avons pas à le condamner.  Il est victime de sa précocité, de son inexpérience dans la gestion des affaires publiques inter États. (…). Donc il n’est pas étonnant de voir un jeune de son âge avec son inexpérience parler d’un sujet aussi délicat que celui qu’il a pris en regardant les élections guinéennes comme il l’a vu à sa manière et s’installer dans un déni. La Guinée n’a jamais rejeté la France, c’est la France plutôt qui a rejeté la Guinée. Le complexe aujourd’hui c’est de nous voir sur la voie de l’émergence sans l’assistance de la France.

Propos recueillis et transcrits par Ramatoulaye Diallo
Journaliste reporter à Guinee114.com
628202653

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