Le Projet minier de Simandou face à la fiscalité guinéenne

La fiscalité minière Guinéenne n’est pas une nouveauté et le projet minier Simandou est un projet d’exploitation d’un gisement de fer composé de 4 blocs qui se situent entre Kérouané et Beyla. Il faut le dire que les produits minéraux Guinéens sont exploités depuis des milliers d’années et tout au long de l’histoire les dirigeants et les gouvernements ont taxé les mines pour s’approprier une partie de la richesse créée. On dit parfois qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil, mais dans l’économie mondialisée d’aujourd’hui, la politique fiscale tient de plus en plus compte de facteurs qui ne jouaient pas un rôle majeur par le passé. Pourquoi est–elle le serpent fiscal des recettes publiques Guinéennes ?

En effet, la question essentielle qui se pose en matière de la fiscalité minière Guinéenne, pour ce qui est de l’objectif consistant à lever des recettes, est de savoir quel doit être le poids de l’impôt. Plus l’impôt est lourd moins le bénéfice des investisseurs est grand et les gouvernements doivent donc faire un arbitrage: si les impôts sont trop élevés, les investisseurs pourraient déserter le pays, mais s’ils sont trop bas, l’Etat risque de renoncer à des recettes sans nécessité. Il faut aussi tenir compte de la question de l’assiette fiscale. Est-il préférable de n’avoir qu’un petit nombre de mines lourdement taxées ou de nombreuses mines ne payant que peu d’impôts ? Cette dernière question a pris beaucoup d’importance ces dernières années depuis que la conservation des ressources est devenue un thème majeur du débat sur le développement durable.

Certains soutiennent qu’en freinant l’exploitation des ressources naturelles on aide à préserver ces ressources pour les générations futures (ils préconisent donc de taxer lourdement les mines pour décourager une exploitation rapide. C’était le cas du régime révolutionnaire de feu Mr SEKOU TOURE), d’autres répondent qu’en exploitant aujourd’hui les ressources minières au maximum on peut créer des infrastructures et financer les autres investissements nécessaires pour un développement plus diversifié et durable et que par conséquent il faudrait taxer les mines le moins possible. C’était le cas de régime du Professeur ALPHA CONDE.

La plupart des gouvernements Guinéens cherchent à trouver un juste milieu entre la maximisation des recettes publiques et la promotion de l’investissement. Malheureusement, jusqu’à présent personne n’a été capable de déterminer ce qu’est un système équitable. A défaut, il convient de se demander si le régime fiscal est compétitif, en considérant que la compétitivité est une bonne approximation de l’équité. Dans l’économie mondialisée du XXIe siècle, les multinationales ont le choix entre de nombreux pays et préfèrent généralement les pays dont la fiscalité est légère.

Les objectifs de la fiscalité minière Guinéenne peuvent être faits entre la promotion de l’investissement, l’accroissement des recettes publiques et le développement du pays. Il faut mettre en évidence les grandes tendances, ainsi que les interactions entre la fiscalité minière Guinéenne et celle des autres secteurs de l’économie. Le pouvoir public a de nombreux moyens d’influencer le comportement des entreprises.

Le plus direct est d’imposer, par la loi ou la réglementation, l’obligation de faire certaines choses, de respecter telle ou telle norme ou de s’abstenir de telle ou telle activité. On peut aussi employer des instruments fiscaux pour inciter les entreprises à adopter le comportement souhaité (par exemple financer le développement énergétique et routier par la fiscalité minière Guinéenne comme préconiser l’ex-Premier Ministre IBRAHIMA KASSORY FOFANA, à l’époque, il était Ministre du Budget). Par exemple, afin d’encourager les investisseurs à mieux respecter l’environnement lorsqu’ils exploitent une mine, l’Etat peut accorder un crédit d’impôt pour l’installation de dispositifs antipollution ou instituer une lourde taxe sur les rejets d’effluents nocifs.

On a la fiscalité pour orienter le comportement des contribuables. On soutient souvent qu’il faut appliquer à l’industrie minière un traitement différent de celui appliqué aux autres activités économiques car c’est une industrie aléatoire, très capitalistique, exposée à de fortes fluctuations des prix de ses produits et qui, dans les pays où l’Etat est propriétaire du sous-sol, exploite le patrimoine national.
Les pouvoirs publics Guinéens ont le choix entre de nombreux types d’impôts et d’incitations fiscales et chacun peut être utile pour atteindre différents objectifs. La composition du menu fiscal peut être importante car les investisseurs ont des préférences marquées pour certains types de régimes.

Mais il faut rappeler le cas atypique de la Guinée à travers cette observation d’un ancien haut cadre du secteur minier : « Le secteur minier guinéen a connu de grandes mutations ces dix dernières années du fait de la transformation de sa base juridique à travers l’adoption d’un nouveau code minier en 1995 et jusqu’à l’évènement du régime de Professeur ALPHA CONDE ; qui mettait l’accent sur la libéralisation des activités minières et le désengagement de l’Etat.

Ces dispositifs, bien qu’étant les ultimes aspirations du gouvernement, n’ont pas connus de succès, vu les résultats actuels enregistrés. » « Aujourd’hui les sociétés Minières présentent globalement des résultats négatifs et cette tendance s’étale sur plus de Dix ans (10) en dépit d’une production toujours croissante et un chiffre d’affaires en hausse progressive depuis 1990 à nos jours. »
En effet : Pour une production de « 188 millions 791 milles kg entre 1990 et 2006, le secteur aurifère a réalisé un chiffre d’affaire de 2 MILLIARDS 192 millions de dollars US » sur lequel montant aucun impôt BIC n’a pu être réalisé – De son côté le secteur bauxite alumine a réalisé au cours de la même période un chiffre d’affaires de 6 MILLIARDS 785 millions de dollars US pour une production de 219 millions 536 mille tonnes avec un BIC prélevé au niveau de Friguia jusqu’en 1999 et d’un montant très discutable au niveau de CBG. Au niveau des procédures d’exécutions des dépenses en général, aucun contrôle de gestion n’est effectué par l’Etat » Ce que vous venez de lire est le résultat du serpent fiscal assortis de la mauvaise gestion de la fiscalité minière Guinéenne. « IL n’y a qu’en Guinée, que des sociétés peuvent faire des chiffres d’affaires en milliards de dollars sans en verser la fiscalité correspondante à l’ÉTAT ; c’est parce que d’autres empochent à la place de l’ÉTAT…

Outre un tissu fiscal de droit commun faible, il faut ajouter le manque de moyens modernes entre les mains de l’administration fiscale Guinéenne pour procéder à des contrôles fiscaux plus efficaces. L’exploitation industrielle des mines d’or en Guinée est censée créer une certaine relation de confiance entre l’Etat et les entreprises d’exploitation. Ces exploitations sont basées sur des conventions d’établissement qui définissent les droits et obligations des acteurs du secteur minier. Mais les évènements récents ne semblent pas confirmer cette relation de confiance.

De plus en plus se créent des climats de suspicion entre les pouvoirs publics, les populations et les entreprises exploitatrices. Le manque de transparence dans la gestion des mines et l’accès restreint à des données peuvent faire échapper certains produits miniers à la détermination d’une assiette fiscale assez adéquate.
En conclusion, la fiscalité minière en Guinée, par l’orientation de la politique fiscale qui s’appuie sur l’utilisation de diverses techniques fiscales, ne manque pas de poser des problèmes aux acteurs du secteur minier, tant à l’administration fiscale qu’aux compagnies minières. Ces problèmes sont à la base de risque auprès des populations : la pauvreté et le retard du développement économique de la Guinée.

Est-ce que le projet minier de Simandou qui rentrera en production à la fin de cette année 2025 ou le début d’année 2026 avec une production annuelle de Rio Tinto et WCS en plein régime de 60 millions de tonnes de fer par an ; va redonner l’espoir au pays de Nimba ?

Dr Mamadou Aliou BAH, Inspecteur Principal des Impôts

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