À titre exceptionnel, les lundi 9 et mardi 10 juin 2025 ont été déclarés fériés, chômés et payés sur toute l’étendue du territoire national par le ministère du Travail et de la Fonction publique. Une mesure motivée par la célébration de la fête de Tabaski, qui a eu lieu le vendredi précédent. Ce lundi, notre rédaction a recueilli les réactions de deux acteurs socio-politiques au sujet de cette décision gouvernementale.
Pour le président de l’Alliance pour le Changement et le Progrès (ACP), Dr Ben Youssouf Keïta, il n’y a aucune objection à émettre. Il a articulé sa position autour des dimensions culturelle, socio-politique et économique.
« Depuis très longtemps, la culture guinéenne avait pratiquement perdu de son lustre. Le fait qu’il y ait aujourd’hui une renaissance visant à redonner de la valeur à notre culture est une excellente chose. Car la culture, c’est la carte d’identité d’un pays », a-t-il déclaré.
Il cite en exemple plusieurs symboles culturels régionaux. « Quand vous parlez de Hirdé au Fouta Djallon, de Kania Soly ou de Yankadi en Basse-Côte, de Doundoumba ou de la Mamaya en Haute-Guinée, ou encore de Toupou Cèssè en Guinée forestière, ce sont des éléments que nous devons valoriser. Moi, en tant que citoyen et homme politique ayant vécu l’après-indépendance jusqu’à aujourd’hui, je ne peux que m’en réjouir. »
L’ancien député a souligné que les fêtes religieuses sont des moments d’unité où toutes les distinctions sociales et ethniques s’effacent au profit d’une atmosphère de joie et de partage. « Ce sont les rares moments où il n’y a aucune distinction entre riches et pauvres, entre Peuls, Malinkés, Soussous ou Forestiers. C’est l’ambiance, la détente, le bonheur. »
Il s’est également félicité de l’inscription de la Mamaya au patrimoine national, suggérant même qu’elle soit reconnue par l’UNESCO. « Pour la première fois, on a invité des pays étrangers à y assister. La Côte d’Ivoire, par exemple, était présente. C’est une très bonne chose. »
Sur le plan social, Dr Keïta salue l’impact positif de ces journées de repos. « C’est l’occasion pour tous de se réunir, de se retrouver, de revivre les souvenirs de jeunesse. Cela renforce les liens et réaffirme la solidité des relations. Cela permet aussi de ne pas oublier nos origines et ceux qui se sont sacrifiés au village pour que nous soyons ce que nous sommes aujourd’hui. »
Il estime que ces moments offrent aux jeunes, aux cadres et aux membres de la diaspora l’opportunité de renouer avec leurs localités d’origine et d’y contribuer. « Ce n’est pas l’État qui peut tout faire. Ces retours permettent d’apporter une assistance ou quelque chose de positif. »
Sur le plan politique, il souligne l’effet d’apaisement qu’apportent les fêtes. « Tant que la population est en liesse, contente, qu’elle chante, danse, mange bien, les dirigeants politiques sont heureux. Cela calme l’atmosphère. Il n’y a pas de manifestations politiques pendant ces périodes. Chacun se pare de ses plus beaux habits. C’est donc une période d’accalmie bénéfique pour le pays. »
Cependant, sur le plan économique, le président de l’ACP relève un bémol. « C’est là où le bât blesse. Car cela ralentit l’activité économique, c’est évident. Par exemple, ce lundi, certaines banques sont fermées, des bureaux aussi. Alors que des citoyens ont besoin de régler des problèmes administratifs, de retirer de l’argent ou de faire tourner leurs affaires. Cela occasionne du retard. »
Néanmoins, il estime que l’impact positif dépasse le négatif. « Lorsqu’on compare l’impact social et culturel, qui est très important, à l’impact économique, qui peut être rattrapé, je pense qu’il ne faut pas se plaindre. La fête de Tabaski n’a lieu qu’une fois par an. Donc, ce sacrifice de quelques jours peut être accepté comme perte et profit. »
De son côté, Ibrahima Aminata Diallo, coordinateur de la Coalition Nationale des Acteurs pour la Paix et le Développement (CONAPAID), a exprimé une opinion critique sur ces deux jours de repos consécutifs. « Cela montre, une fois encore, qu’il n’y a pas de sérieux dans ce que nous faisons. Deux jours consécutifs de congé privent les citoyens d’un accès aux services bancaires et perturbent les déplacements ainsi que des activités déjà planifiées. »
Il déplore également le manque d’anticipation, notamment dans le secteur de l’éducation. « Nous sommes à la veille des examens, les élèves doivent être évalués le 12 juin, et nous sommes le 9. Il y a tellement de choses à faire en cette période. Je pense qu’il faut revoir cette manière de gérer. »
Mamadou Macka DIALLO
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