Une nouvelle directive qui vient s’ajouter à toutes les intentions prononcées jusque-là à propos du concept Gouverner autrement. Si elle a l’avantage d’exprimer une certaine volonté apparente de résoudre un handicap au bon fonctionnement du service public, la mesure annoncée par le chef de l’Etat en conseil des ministres jeudi 11 mars 2021, qui permettra désormais aux directions des EPA (Etablissements publics à caractère administratif) de pouvoir contourner leur ministres de tutelle pour toucher à leur subvention, porte en elle les germes d’une amplification de l’insubordination déjà chronique dans certains départements ministériels.
«Le Président de la République a ordonné aux ministres en charge des Finances et du Budget de publier un arrêté conjoint formalisant le paiement direct aux EPA des subventions prévues dans la Loi des Finances sans l’intermédiation des départements de tutelle», peut-on lire dans le compte-rendu du dernier conseil des Ministres servi à la presse par la Cellule de communication du gouvernement. Cette décision du président de la République est motivée par le fait que, selon lui, certains ministres détourneraient des montants destinés à des EPA sous leur tutelle.
Lors de son deuxième mandat, le président Alpha Condé, tout fier d’avoir un groupe de jeunes fonctionnaires, 518 au total, formés avec l’appui de l’Union européenne, s’est laissé entrainé par la joie jusqu’à donner à ces fameux 518 (dont la plupart sont des DAAF), l’autorisation de défier les ministres dans l’exécution des budgets de ces derniers.
Les conséquences sont aujourd’hui palpables. Beaucoup de DAAF membres de ce groupe n’ont plus jamais obéi à leurs ministres. Au sein de l’opinion publique, ils sont accusés de s’être vachement enrichis avec les deniers publics. Comme s’il n’avait tiré aucune leçon de cette douloureuse expérience, comme s’il n’a jamais compris que cette démarche a affaibli certains ministres, et augmenté la perception de corruption dans l’administration publique, le chef de l’Etat risque de fabriquer de nouveaux problèmes aux ministres en donnant ainsi des ailes aux directeurs des EPA aussi.
La mesure pourrait être détournée de son sens voulu par le président Alpha Condé et brandie comme un trophée de guerre par certaines directions d’EPA qui ne s’entendent pas déjà avec les cabinets de leurs ministères de tutelle.
Thierno Amadou M’Bonet Camara (Rescapé N°4)
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