Dans la journée du 28 mars 2022, le procureur général près la cour d’appel de Conakry, Alphonse Charles Wright était devant la presse pour faire le compte rendu de sa tournée et communiquer sur certains dossiers en sa possession. À cette occasion, le bouillant procureur a mis en garde un membre influent du CNRD, colonel Bala Samoura, haut commandant de la gendarmerie nationale par rapport à ses « interférences » dans les missions des officiers de la police judiciaire.
« Aucun d’entre eux n’a totalement tort. Le procureur général n’a pas totalement tort mais le haut commandant de la gendarmerie n’a pas totalement tort aussi. Donc chacun d’entre eux a raison en partie. Lorsque vous prenez les dispositions de l’article 13 du code de procédure pénale en ce qui concerne les officiers de police judiciaire. Cet article commence en disant ont la qualité d’officiers de police judiciaire: 1-les officiers de gendarmerie;
2-les sous officiers de gendarmerie exerçants les fonctions de commandants, de brigades, etc… Maintenant les commissaires de police. Donc du point de vue de la qualité, dès lors qu’on est officier de la gendarmerie, on a la qualité d’officier de police judiciaire. De ce point de vue-là le colonel Bala Samoura a raison de dire qu’il a la qualité d’officier de police judiciaire. Autrement dit, c’est une qualité qu’il a de droit comme tout autre officier de gendarmerie parce que la loi ne fait pas la distinction entre officiers subalternes, officiers supérieurs ou officiers généraux. On a dit simplement les officiers de gendarmerie. Et d’ailleurs, l’énumération commence par les officiers de gendarmerie. Mais cela ne suffit pas. C’est là où l’article 14 est intéressant. L’article 14 dit que même si de par la loi on a la qualité de police judiciaire, on ne peut pas exercer les attributions attachées à cette qualité si on est pas à une fonction comportant l’exercice de cette qualité. Autrement dit, même si on a la qualité d’officier de police judiciaire, on ne peut pas s’en prévaloir et exercer les attributions qui sont liées à cette qualité si par exemple on est pas affecté dans un service de police judiciaire. Mais la deuxième condition-là aussi ne suffit pas et c’est là qu’intervient disons la position du procureur général qui dit qu’il faut l’habilitation. Là également c’est une condition parce que toutes les trois conditions sont cumulatives. J’ai l’impression que le procureur général met l’accent plutôt sur l’exercice de la fonction plus sur l’exercice que sur la qualité. Pour ce qui est de la qualité, on peut dire le haut commandant a la qualité mais pour ce qui est de l’exercice, il ne peut pas exercer. Parce que: 1- il n’est pas à un emplois qui implique l’exercice d’une mission de police judiciaire;
2- il n’est pas habilité. Et là, je pense que personne ne peut contester cela. Parce que personne ne sait cela mieux que le procureur général parce que c’est lui qui signe les habilitations. En fait, c’est une décision par laquelle le procureur désigne nommément et personnellement les officiers qui doivent exercer une mission de police judiciaire. Et lorsqu’il dit que le haut commandant de la gendarmerie nationale n’a pas le droit d’interpeller, il n’a pas le droit de convoquer, il n’a pas le droit de donner des instructions aux hommes qui sont sous son ordre lorsque ceux-ci agissent dans le cadre d’une mission de police judiciaire, il a parfaitement raison. Personne ne peut contester cela aussi. Je pense qu’il faut plutôt voir ce que le procureur a voulu dénoncer. Nous avons tous appris ces derniers temps que des personnalités de l’Etat ont été appelés par téléphone et ont été invités à se rendre au haut commandement de la gendarmerie nationale et qui ont passé des heures et des heures. Il y en a même qui ont passé des nuits. Or, le haut commandement en tant que tel n’est pas un service de police judiciaire. C’est la direction centrale des investigations de la gendarmerie nationale qui est un service de police judiciaire. Donc si on ne fait pas la part de choses, on risque de créer un amalgame. Parce qu’il faut éviter que chaque porteur de tenue, chaque porteur d’uniformes se croit officier de police de judiciaire… Il faut aller au delà de la lecture de l’article 13 et voir aussi l’article 14 qui fixe deux conditions et d’ailleurs comme je l’ai dit au départ toutes les conditions-là sont cumulatives. (…) Et d’ailleurs lorsque les hommes en uniformes que ce soit des gendarmes ou des policiers, lorsqu’ils exercent ou plutôt ils mènent une enquête judiciaire que ça soit une enquête de flagrance ou bien une enquête disons préliminaire, ils ne relèvent pas de leurs supérieurs hiérarchiques. Ils relèvent du procureur général qui assure la direction de la police judiciaire. Je pense que de ce point de vue-là il faut que l’on soit très clair », a longuement expliqué, maître Mohamed Traoré avocat à la cour sur Djoma FM ce mardi, 29 mars.
À signaler que le procureur général près la cour d’appel de Conakry a été suspendu de ses fonction ce mardi par le ministre de la justice, garde des sceaux.
Mamadou Macka Diallo
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