Ouvert le 24 novembre dernier au tribunal de première instance de Dixinn siégeant en matière correctionnelle, le procès de l’ancien ministre de l’Urbanisme et son Secrétaire général accusés par les victimes du déguerpissement de Kaporo rails d’être à l’origine de leur malheur, s’est poursuivi ce jeudi, 8 décembre 2022.
Le dossier avait été renvoyé à deux semaines à l’issue de la première audience pour la comparution de Dr Ibrahima Kourouma détenu à la Maison Centrale de Conakry pour une autre affaire. A cause de son absence dans le box des prévenus, le ministère public a sollicité dès l’ouverture de l’audience, un renvoi de deux mois, le temps pour lui de mener des démarches pour l’extraction de l’ancien ministre.
L’avocat de la partie civile préoccupé par l’évolution de cette affaire, s’est opposé à cette demande du parquet.
Comme pour couper la poire en deux, le président du tribunal a finalement décidé de renvoyer l’affaire à deux semaines.
Au sortir de la salle d’audience, l’avocat de la partie civile, maître Alpha Yaya Dramé qui s’est prêté aux questions des journalistes, a fustigé le motif du renvoi.
«Dans une procédure comme celle-là, je ne peux pas m’opposer à une demande de renvoi. Fût-elle du parquet ou de la partie adverse. Parce que le principe de tout procès, c’est le contradictoire. La personne déférée devant ce tribunal est présumée innocente jusqu’à preuve du contraire. Donc on respecte en tant qu’avocat le principe du contradictoire. Ce que je refuse d’accepter, c’est qu’il y ait deux catégories de citoyens: les grands citoyens et les petits citoyens. La personne qui est prévenue est sous mandat de dépôt à la Maison Centrale. La dernière fois, le parquet et la partie civile ont sollicité un renvoi pour leur permettre de s’organiser afin d’extraire Monsieur Kourouma de sa cellule et permettre sa comparution. Aujourd’hui, avec étonnement, le procureur nous apprend qu’il aurait fait des diligences, qu’il aurait même demandé l’autorisation du juge d’instruction qui a placé Monsieur Kourouma sous mandat de dépôt. Qu’il lui aurait renvoyé vers le procureur spécial. Sauf que peu importe la personne, le parquet ici, il ne dépend pas du parquet spécial de la CRIEF (Cour de Répression des Infractions Économiques et Financières). Les faits pour lesquels il est placé sous mandat de dépôt ne font pas partie des faits pour lesquels il est cité ici devant le tribunal de première instance de Dixinn, des chefs de plusieurs infractions dont nous lui accusons», a expliqué maître Alpha Yaya Dramé.
Et d’ajouter: «Le parquet ici n’a pas besoin d’une autorisation spéciale pour extraire quelqu’un. Quand le tribunal demande à ce qu’une personne soit extraite, elle doit être extraite pour pouvoir répondre. C’est-à-dire que même ces personnes qui sont libres, qui ont cette liberté de mouvement, de fuir de ne comparaître, la loi a prévu des dispositions pour permettre leur recherche et leur obliger à comparaître à fortiori quelqu’un qui est sous mandat de justice. Donc, si on nous dit qu’au regard du contexte actuel, Monsieur Kourouma ne peut pas comparaître devant le tribunal de séance, alors dans ce cas, ce qui veut dire qu’on a deux citoyens. C’est la seule circonstance qui fait que lui il est ancien ministre qui fait que lui il est au-dessus des autres. C’est ça que je refuse».
L’avocat a aussi donné son impression sur le renvoi dont il ne s’est d’ailleurs pas opposé.
«Sur la demande de renvoi, une procédure peut prendre le temps qu’elle va prendre en fonction du besoin du tribunal et en fonction du besoin du contradictoire. Mais c’est les motifs qui ont justifié sa non comparution aujourd’hui que je fustige. Le parquet n’a pas à dire à l’audience que la hiérarchie lui aurait dit qu’il faudrait obtenir l’autorisation du procureur spécial de la CRIEF. Qui est compétent en matière de crime économique se rapportant à un certains seuils. Donc, quand la même personne poursuivie par deux juridictions quand il est appelé à comparaître, on ne peut faire obstacle à la comparution que s’il est malade ou si la date à laquelle sa comparution est demandée, il a déjà une audience qui est prévue puisqu’il ne peut pas être à deux endroits différents au même moment. Donc, encore une fois, je ne peux pas m’opposer à la demande de renvoi, je m’oppose au motif du renvoi et je refuse qu’il y ait un citoyen ordinaire et un citoyen spécial. Un État de droit, c’est un État qui traite de manière égale tous les citoyens », a-t-il martelé.
À noter que l’avocat de la partie civile était accompagné de plusieurs membres du collectif des victimes du déguerpissement de Kaporo rails.
Mamadou Macka Diallo depuis le TPI de Dixinn
666 660 366