Le mouvement panafricain des personnes sourdes (Panas) a lancé ce mercredi, 14 juin 2023, les ateliers de validation du module de formation en langues des signes dans les écoles de formation des enseignants et de formation de formateurs en conception visuelle des documents en langues des signes.
Ces ateliers font suite à l’atelier régional sur l’accès des personnes sourdes aux santés sexuelles et à la reproduction tenu le 25 mai dernier à Conakry. Elle est composée de 51 organisations de personnes sourdes de 34 pays africains et compte plus de vingt millions de personnes atteintes de déficiences auditives.
Selon les organisateurs, cette initiative est partie du constat selon lequel, il n’existe véritablement qu’une seule école spécialisée pour les enfants sourds en Guinée, qui se limite au cycle primaire sans aucune perspective pour les élèves Sourds. Ce qui est le plus désolant, c’est que les enfants sourds au terme de plusieurs années de scolarisation dans ladite école, ne sont pas capables de lire et d’écrire convenablement. Il n’existe pas encore d’écoles inclusives pour les enfants sourds dans le pays.
Parmi les raisons fondamentales qui sont à l’origine de cette situation, les organisateurs ont cité entre autres, le manque d’enseignants et de professeurs formés en langues des signes ; la langue des signes guinéennes n’est pas généralisée, et il n’y a aucun programme de recherche et de développement des langues des signes guinéennes en vue de leur standardisation ; la pauvreté de l’enseignement qui leur est dispensé en raison de l’absence totale de matériels didactiques et de supports pédagogiques modernes ; le laisser-aller qui sévit dans la plupart du système éducatif des enfants sourds par le manque de contrôle de la qualité des programmes pédagogiques dispensés.
Les mouvement panafricain des personnes sourdes note que « partout où l’éducation des enfants sourds est placée sous la tutelle du ministère des Affaires sociales, elle est confrontée à un véritable blocus par le fait que ce ministère ne dispose pas de cadres compétents pour planifier et mettre en œuvre des programmes éducatifs de qualité, mais également de contrôle pédagogique du contenu des programmes ».
Pour remédier à cet état de fait, Elhadj Alpha Boubacar Diop, le président du mouvement, a soumis une demande aux autorités du CNT.
« Pour toutes ces raisons évoquées ci-dessus, vous me permettrez de profiter de cette opportunité pour vous demander humblement d’accepter de transférer la tutelle des écoles spécialisées au MEPU-A. Vous aurez ainsi rendu un grand service aux enfants et jeunes sourds de notre pays, à leurs familles et à la nation guinéenne toute entière. Comme vous le savez, on peut construire un bâtiment et le détruire 100 ans plus tard pour reconstruire un plus bel édifice. Mais tel n’est pas le cas de l’être humain.
Je vous saurai également gré de bien vouloir instruire les départements en charge de l’éducation et de la formation de prendre en compte dans leur plan opérationnel au niveau du fonds commun à l’éducation à l’occasion de la LRF 2023 et des années à venir, les priorités suivantes : la prise en charge des formateurs en langues des signes dans les écoles de formation des professeurs, enseignants ordinaires et techniques ; la conception des documents didactiques et des supports en langues des signes et en écriture braille ;
La recherche et le développement des langues des signes guinéennes en vue de leur standardisation par la réalisation d’un dictionnaire guinéen des langues des signes et de livres intermédiaires de langues des signes ; la formation et le perfectionnement des enseignants des écoles spécialisées ; l’organisation d’un module de validation du module en écriture braille que nous avons déjà élaboré ; la transcription en écriture braille des manuels scolaires du cycle élémentaire à celui de l’enseignement supérieur ; la prise en charge à titre transitoire d’enseignants expatriés spécialisés dans I’éducation des enfants sourds et aveugles » a t-il indiqué.
Pour joindre l’utile à l’agréable, Elhadj Alpha Boubacar Diop, par ailleurs conseiller chargé d’inclusion du président du CNT, sollicite auprès de Dr Dansa Kourouma, la reconnaissance des langues des signes comme une langue nationale dans la future constitution du pays.
« Comme un jargon, la langue des signes pratiquée dans un pays n’a pas nécessairement de liens avec la langue orale de cette même région. En dépit des différences entre les langues des signes du monde, la compréhension et la communication est rapidement possible entre deux personnes maitrisant des langues des signes différentes.
C’est pourquoi, dans tous les pays, les efforts sont conjugués vers la standardisation des langues des signes par la création de lexiques et de dictionnaires de la langue des signes. Nous sollicitons très humblement du CNT la reconnaissance des langues des signes dans la future constitution comme es autres langues nationales du pays » a t-il plaidé.
Au nom du Dr Dansa Kourouma, c’est Elhadj Séni Facinet Sylla, deuxième vice-président du CNT, qui a présidé la cérémonie d’ouverture desdits ateliers. Il dit avoir pris bonne note des sollicitations du président du Réseau panafricain et a promis de rendre compte à qui de droit.
« Le CNT se réjoui de cette initiative qui est conforme à l’objectif numéro 4.5 des ODD dans le cadre de la promotion de la diversité et de l’inclusion qui est une priorité que l’État guinéen s’est fixé en accord avec ses partenaires pour éliminer les inégalités dans le domaine de l’éducation et assurer l’égalité d’accès des personnes vulnérables y compris des personnes handicapées à tous les niveaux d’enseignement et de formation professionnels.
En m’adressant à vous ce matin, je voudrais vous assurer du soutien indéfectible du CNT à accompagner vos projets et initiatives allant dans le sens de l’instauration d’une société véritablement inclusive dans notre pays. Par ma voix, le Conseil National de la Transition sera attentif à la réduction des inégalités ou disparités fondées sur le handicap. Nous savons tous que le handicap est une problématique transversale et multisectorielle. Elle concerne tous les secteurs vitaux de la nation.
C’est pourquoi, je profite de cette opportunité pour inviter toutes les autorités à veiller à ce que tous les départements ministériels concernés prennent en compte la dimension handicap dans leur plan opérationnel, chacun selon son domaine de compétences. Il est important qu’à l’occasion de la revue à mi-parcours du PRM et de la loi rectificative des finances 2023, les priorités relatives aux personnes handicapées soient prises en compte pour parvenir à l’objectif de ne laisser personne de côté.
J’appuie la demande du Président de la PANAS de transférer la tutelle des écoles spécialisées au niveau de l’éducation, car l’éducation doit revenir aux départements ministériels qui en ont la charge. Je peux vous donner l’assurance que le CNT fera sien cette proposition et nous allons en discuter de façon sérieuse avec les ministères concernés parce que ça ne sera que justice rendue » a t-il promis.
Diop Ramatoulaye
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