Soutien affiché du CNRD depuis son arrivée au pouvoir, Élie Kamano émet des doutes quant à la réussite de la transition en Guinée. Le raggaeman et homme politique relève des agissements au sommet de l’État qui ne sont pas de nature à rassurer l’opinion nationale et qui lui font croire que la transition est en train de vaciller. Il dénonce notamment l’incohérence du gouvernement guinéen par rapport à son attitude vis-à-vis de la CEDEAO.
« Je pense qu’elle (la transition) vacille, c’est mon avis. Déjà, elle courbe l’échine devant une CEDEAO qu’on a tous dénoncée, principalement moi. On ne peut pas tenir un discours souverainiste devant la CEDEAO et lui demander à mon avis d’être notre garant auprès des bailleurs de fonds pour nous sortir du trou. Pour moi, la Guinée a toutes les ressources nécessaires pour l’organisation de ses élections, elle doit tout simplement mettre de l’ordre dans ses affaires. Sur d’autres plans, nous avons un porte-parole qui s’arcboute beaucoup plus sur l’UFDG que sur le respect des dix points qu’il a déroulés devant le peuple.
Parce que, personnellement j’avais défendu ce calendrier becs et ongles dans une de vos émissions. Si vous vous rappelez, ça m’a valu ce que ça m’a valu, mais je l’ai assumé. Mais je constate que le cas des six cent millions (600 000 000) de dollars qu’on a demandés aux bailleurs par la bénédiction ou avec la bénédiction de la CEDEAO pour la tenue des élections est beaucoup plus d’actualité aujourd’hui que les engagements qu’on prenait devant vous. Je dis “qu’on”, parce que je fais partie de ceux-là qui ont défendu et relayé aux plans national et international ce calendrier.
Donc, je ne m’exclus pas. Et ma peur se situe au niveau du déficit de communication entre les membres d’un même navire. Parce que si vous nous dites que vous pouvez chronologiquement respecter le calendrier que vous avez élaboré dans le temps que vous-mêmes vous avez choisi, nous, on défend cette position. Mais lorsque vous sortez avec d’autres déclarations qui remettent en cause celles que nous défendions, moi, je m’arrête tout de suite et je pose des questions », a-t-il déclaré ce mercredi, 13 septembre 2023, sur les ondes de FIM FM.
En plus de cette incohérence, l’artiste s’insurge contre la corruption qui gangrène la gouvernance actuelle. Il confirme ses propos tenus récemment, dans lesquels il accusait des hauts cadres de l’État d’avoir réclamé des pots de vin à des gens qui voulaient rencontrer le président de la transition pour lui présenter des projets importants pour la Guinée.
« Je n’ai pas cité le nom d’un commis de l’État, j’ai dit que des gens étaient passés me voir, des gens qui ont appris que j’ai de bonnes relations avec le président. Ils sont venus voir dans quelle mesure je pouvais les aider à avoir un rendez-vous, parce qu’ils ont été abusés et on leur a demandé de payer une somme d’un à deux millions de dollars pour que leurs dossiers soient introduits chez le Président, traités et validés. Je n’ai aucun intérêt à inventer des choses sur un système que j’ai défendu et que je continue à défendre au plan national et international. J’ai dit au Président, dès les premières heures de cette transition, de faire comme Jerry Rawlings et qu’au lieu de tirer sur les populations, il fallait tirer sur les voleurs de la République. Donc, ce qui se passe, je ne peux pas me taire là-dessus », a-t-il dit.
Élie Kamano précise toutefois que ses sorties ne veulent pas dire qu’il retire son soutien aux autorités de transition. Il réitère son amitié avec le colonel Mamadi Doumbouya qui, selon lui, n’est pas à l’origine des problèmes qu’il dénonce. « Le président Doumbouya est une chance pour la Guinée, mais je demande à ceux qui sont auprès de lui, à ceux qui l’entourent, d’utiliser la marque Doumbouya à bon escient. J’assume ce que je dis et j’assume mon amitié avec lui, mais je refuse de fermer mon bec devant les bavures commises par certains qui pourraient le rattraper demain. Je ne retire pas mon soutien, je suis encore dans le bateau », a laissé entendre cet artiste et homme politique.
Pour rappel, d’autres soutiens du gouvernement de transition ont récemment exprimé des préoccupations par rapport à la mise en œuvre du chronogramme de la transition. Plusieurs coalitions politiques et faîtières de la société civile qui ont participé au dialogue inter guinéen, ont envoyé un mémorandum au colonel Mamadi Doumbouya dans lequel ils ont exprimé leurs inquiétudes.
Mamadou Macka Diallo
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