Boubacar Yacine Diallo dénonce la pollution de la presse guinéenne: « en Guinée maintenant, c’est un journaliste qui est l’organe »

Le président de la Haute Autorité de la Communication a jeté un regard critique sur l’évolution de la presse en Guinée des années 90 à maintenant.

Invité chez nos confrères de Fim fm ce mercredi, 25 août 2021, Boubacar Yacine Diallo a décrit les faits, pas sans dire son regret. Il a surtout saisi l’occasion pour dénoncer certaines pratiques peu orthodoxes au sein de la corporation.

« J’ai une déception en ce qui concerne la presse écrite. Elle existe depuis 91, 92. La Guinée n’a pas réussi à avoir un seul quotidien. Ça, c’est mon premier regret. Il n’y a pas de quotidien, je le regrette et je le condamne même. J’en ai honte. Mais malheureusement, c’est qu’il y a plus de journalistes que d’organes. Parce qu’en Guinée maintenant, c’est un journaliste qui est l’organe. On me dit, c’est une critique qu’on fait, que je n’ai pas voulu donner des cartes à des journalistes qui travaillent pour des entreprises de presse qui n’ont pas de siège. Pour moi, une entreprise qui n’a pas de siège, n’existe pas. C’est élémentaire, ça quand même. Je me suis amusé même à leur dire, mais où est-ce qu’on vous dépose la publicité ? Parce qu’aucun annonceur ne vous amène la publicité par internet. Il faut qu’il s’assure que si sa pub ne passe pas, il a, au moins, un endroit pour aller réclamer. Alors c’est la conséquence de la manière dont la subvention a été répartie depuis le début. Elle a fait éclater la presse en de petits groupuscules, dirigés par des individus. Chaque journaliste est patron. C’est une exceptionnelle guinéenne. Il faut arrêter ça.

Prenez les grands journaux français. Ils se sont recyclés. C’est-à-dire qu’il n’y a que quelques Vieux qui achètent « Le Monde » (un journal français en papier ndlr). Mais tout le monde lit « Le Monde » à la seconde près, les informations défilent à la seconde près. Mais en Guinée, les entreprises de presse ne sont pas constituées. C’est la conséquence. Et aujourd’hui malheureusement, j’ai vu dans la répartition de la subvention des journaux qui n’existent plus. Pour tant qui étaient des pionniers. Donc, je pense que ça, c’est un échec et on doit pouvoir réfléchir sur les conditions de relance de la presse écrite parce qu’elle a encore sa place. Mais sous réserve qu’elle s’adapte à la description que vous étiez en train de faire (la numérisation : ndlr). Sinon, elle est condamnée à mort. Et ça serait triste.

La presse en ligne est devenue le quotidien. C’est-à-dire que tout le monde se réveille avec la presse en ligne et tout le monde dort après avoir consulté la presse en ligne. Là également, il y a des entreprises qui sont constituées. Malheureusement aujourd’hui, presque chaque journaliste à un site à lui. Mais il fait du copier-coller. Il fait du plagiat parce que seul, il ne peut pas produire de contenu pour un site d’information. Mais c’est l’une des conséquences encore de la subvention. C’est-à- dire que vous prenez un journaliste qui est déjà employé, qui a un site, qui a 17 millions de francs guinéens de subvention par an, ça lui fera 1.500 mille par mois. Un fonctionnaire fraîchement engagé à la fonction publique, c’est son salaire. Donc voilà un individu qui gagne l’équivalent du salaire d’un fonctionnaire qui va pendant 30 jours au travail, alors que lui, il est déjà employé d’un média. Ça, ça doit encore s’arrêter », a dénoncé le président de la Haute Autorité de la Communication, Boubacar Yacine Diallo.

Djély Mamadou KOUYATÉ

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