Depuis son avènement, le 05 septembre 2021, au sommet du pouvoir en Guinée, le Colonel Mamadi Doumbouya aura eu le mérite de la cohérence dans ses discours et actes. Même dans des situations estimées explosives, le père de la refondation est resté fidèle à ses engagements, égale à lui-même.
Cependant, le décret du samedi 28 janvier, jugé comme étant un contre acte d’un décret qui a commencé à produire de bons effets, ressemble à la première tâche noire versée au beau milieu d’un drap blanc et propre. Pour des observateurs, ce décret à odeur d’un dispendieux pot-de-vin, est une forme grave de trahison contre le Colonel Mamadi Doumbouya de la part de certains de ses collaborateurs.
Rarement, ces 10 dernières années, un acte présidentiel n’aura provoqué la controverse et suscité la polémique que le Décret D2023/0045/PRG/CNRD/SGG portant création, attribution, organisation et fonctionnement de l’Autorité de régulation du secteur de jeu et pratiques assimilées publié le samedi 28 décembre 2023.
Depuis la prise du pouvoir par le CNRD, c’est la première fois que le Colonel Mamadi Doumbouya, vêtu de la tenue d’Homme d’Etat, de parole et vigilant sur son image de marque, pose un acte pour le moins incompréhensible au niveau de l’opinion dans la mesure où il n’est dicté par aucune urgence du moment et donne le sentiment de contredire l’une de ses mesures majeures de refondation du secteur des jeux, en l’occurrence le Décret D/2022/N0236/PRG/CNRD/SGG du 13 Mai 2022 complétant le Décret N°028/2000/PRG/0236/PRG/SGG du 28 mars 2000.
Surtout que ce Décret, conférant à la Lonagui, à compter du 14 Août 2022, la gestion sur toute l’étendue du territoire national la commercialisation de toutes les formes de loterie et pronostics en réseau physique de distribution y compris celles des paris sportifs, produit des recettes quotidiennes de plus de 3 milliards GNF avec moins de kiosques (que ceux qui excellaient dans la tricherie contre l’Etat en déclarant 700 millions GNF) palpables pour le Trésor public.
En dépit des manipulations, campagnes médiatiques, des instrumentalisations et violences commanditées à coût d’espèces sonnantes, le tombeur du professeur Alpha Condé était resté droit dans ses bottes, en faisant preuve d’un sens de responsabilité et de fermeté rigoureux. Le pourfendeur de la gabegie du régime déchu savait que les revenus de la Loterie sous toutes ses formes et dans tous les pays du monde servent à la Nation et non exclusivement à des individus d’où l’évocation de la notion de l’intérêt général. C’est le cas chez nos voisins, au Sénégal avec la LONASE ou en Côte d’Ivoire avec la LONACI notamment.
Alors pourquoi ce revirement aujourd’hui à 100 degrés ?
Selon les informations très vraisemblables qui circulent sur les réseaux sociaux et dans les salons feutrés de Conakry, le Colonel Mamadi Doumbouya serait abusé par certains de ses proches collaborateurs et hommes de confiance. Le nom du directeur de cabinet, Djiba Diakité et celui du ministre secrétaire général, le colonel Amara Camara ainsi que celui du conseiller, Thierno Mamadou Bah à un moindre degré sont cités dans cette affaire au goût sulfureux et caustique.
Dans certains milieux avisés, on avance le montant de 9 milliards GNF qui serait déboursé par le propriétaire de Guinée Games, Antonio Souaré en faveur des sus-nommés sur le dos du Président Mamadi Doumbouya.
Toujours est-il que depuis que le signal de Guinée Games a été coupé, Antonio Souaré aurait quasiment élu domicile dans certains bureaux de la présidence de la République comme si la loterie était son unique activité. Depuis, l’ancien bras financier du régime du RPG essaie de se faire remarquer dans des mamayas opportunistes comme lors de l’an 1 du CNRD par le rebranding du bus du 3ème mandat de l’effigie d’Alpha Condé à celle du Président Colonel Mamadi Doumbouya, au tournoi de football à Dinguiraye etc.
Si le Colonel Mamadi Doumbouya est resté totalement insensible par rapport à ces calculs démagogues en privilégiant l’intérêt national, nul doute finalement que seules des supposées plaidoiries de ses collaborateurs proches de confiance l’auraient amené à cette ouverture du pari en ligne à la concurrence. Toujours est-il que ce Décret n’est pas fortuit quand Guinée Games jubile en rêvant d’une imminente reprise de ses activités.
Pour leurs poches, des proches voudraient-ils entraîner ainsi le Président Mamadi Doumbouya sur une dangereuse piste. En tout cas, il ne manquait plus que ça pour se souvenir des derniers instants du régime de Lansana Conté, marqués par des décrets et contre décrets dictés par le fait que l’entourage du président était devenu un énorme ring où s’affrontaient des intérêts malsains des groupes et clans mafieux.
Ouvrir le secteur des jeux à des opérateurs privés (ce qui ne se pratique nulle part), alors qu’il y a juste cinq mois, un décret attribuait à la LONAGUI, donc à l’Etat le monopole des jeux physiques après le constat d’une certaine délinquance financière dans le domaine, emmène évidemment à se poser des questions. Tout le monde se souvient de la féroce résistance que la société Guinée Games a exercée, allant jusqu’à l’affront contre un Etat incarné par le colonel Mamadi Doubouya dans son noble combat de mettre fin à un système qui a longtemps enrichi des individus égoïstes au détriment de l’Etat et de la population dans leur précarité.
Le drame est qu’on a tout de suite laissé croire à l’opinion que ce décret n’est que le début d’une démarche consistant à ouvrir à nouveau les jeux physiques à des opérateurs longtemps coupables de faux chiffres très minorés au détriment de l’Etat.
Favoriser ses intérêts personnels jusqu’à trahir la confiance présidentielle sont une forme de crime dont les conséquences sont souvent fatales.
Tout le monde sait la bonne volonté du président Doumbouya, son sens du patriotisme et son engagement à placer l’intérêt général au cœur de ses reformes. Scandalisée, l’opinion se demande désormais qui dans son entourage a fait quoi pour que le Colonel Mamadi Doumbouya soit entrainé sur cette piste contraire à la refondation.
Dans tous les cas de figure, le Colonel Mamadi Doumbouya a tout intérêt à demeurer vigilant sur la moralité de ses collaborateurs proches plus nocifs que ses adversaires et ennemis lointains
Labila Pogomou