Ce mardi, 05 septembre 2023, marque le deuxième anniversaire de l’avènement du CNRD au pouvoir. Et c’est l’occasion de faire le point sur la gestion du pays par la junte militaire qui a renversé le président Alpha Condé, le 05 septembre 2021. Évoquant ce sujet dans un entretien qu’il a accordé à Guinee114, Dr Ben Youssouf Keïta a tiré un bilan globalement positif. Le président du parti Alliance pour le Changement et le Progrès (ACP) a évoqué plusieurs actions posées qui plaident en faveur des autorités de la transition.
« Chez nous, nous considérons le bilan globalement positif. Pour la simple raison que nous savons d’où nous venons et nous savons qu’est-ce qui a amené le coup d’État du 05 septembre, avec l’irruption de l’armée sur la scène politique. Dès l’arrivée de l’armée, la première chose positive, c’est les assises nationales parce qu’avant, il y’avait une crise totale entre tous les acteurs. Ça a été la première action positive du CNRD, les assises nationales au palais du peuple qui ont vu tous les Guinéens des différents horizons s’asseoir dans une même salle, se regarder en face et communier (…).
La deuxième, c’est la création du cadre du dialogue avec l’installation d’un comité de suivi. Quelles qu’en soient les conditions, il vaut mieux qu’il y ait un lieu de dialogue qu’un affrontement. Nous avons salué le cadre de dialogue qui est évidemment en train de faire son bout de chemin. Quoi qu’il y ait une certaine péripétie et certains écueils, mais la finalité, les Guinéens de tous les bords se retrouvent autour de la table et discutent en famille, ça c’est une action positive. Ensuite, nous avons constaté le nettoyage du fichier de la Fonction publique. Vous savez, la Fonction publique était vraiment un fourre-tout.
On pouvait voir des fonctionnaires fictifs, des fonctionnaires qui sont inscrits cinq, dix fois et des fonctionnaires qui prennent des salaires indus, même pour des personnes décédées. Alors, ce nettoyage du fichier de la Fonction publique est une action positive à saluer. Nous avons noté également comme action positive, la poursuite des actions de l’administration, parce que vous savez que l’administration est une continuité. C’est-à-dire que le CNRD, quand il est venu, n’a pas jeté le bébé avec l’eau du bain, il a jeté l’eau du bain et il a gardé le bébé. Ça veut dire que nous avons constaté la poursuite de l’investissement en infrastructures.
Aujourd’hui, il n’y a pas un seul quartier de Conakry qui n’est pas en train de recevoir en tout cas des actions du ministère des Travaux publics. Donc, il y a des routes qui sont en train d’être construites un peu partout. Nous avons vu des routes interurbaines qui sont en train d’être poursuivies pour un aboutissement heureux et il y a même des routes internationales comme Guinée-Guinée-Bissau-Kébou vers le Sénégal, c’est des actions positives. Nous avons vu, nous médecins, l’inauguration de l’hôpital Donka. Tout le monde savait que l’hôpital Donka, depuis plus de dix ans, était en chantier (…).
Et dans le domaine médical aussi, nous voyons que le Ministère de la Santé est en train de mettre les bouchées doubles pour que la Guinée retrouve sa place d’antan dans le domaine de la santé en Afrique. Autre action positive que notre parti a appréciée, c’est la création de la CRIEF. La CRIEF, ce n’est pas un règlement de comptes, ce n’est pas une chasse aux sorcières. La CRIEF, c’est d’abord ceux qui ont géré avant qui doivent obligatoirement rendre compte et ceux qui gèrent aujourd’hui qui seront obligés de rendre compte. Alors, cette CRIEF qui traque les délinquants en col blanc, les délinquants économiques, est une action salutaire.
Nous voulons tout simplement qu’elle continue ses actions de manière impartiale et comme nous l’avons dit, pas de chasse aux sorcières. Que les coupables soient punis mais qu’aucun innocent ne soit condamné. Que l’État recouvre les biens qui lui ont été spoliés. Dans le domaine de l’agriculture aussi, aujourd’hui, nous sommes en train d’aller vers l’autosuffisance alimentaire. La Guinée s’est classée deuxième pays producteur de riz en Afrique occidentale derrière le Nigéria. Et ça, c’est un bilan positif pour le CNRD. Surtout qu’aujourd’hui, nous avons vu la commande de beaucoup d’engins d’agriculture, d’intrants à bon prix et l’encouragement des agriculteurs.
Ce sont des actions positives à saluer de la part du CNRD. En ce qui concerne l’armée, nous savons qu’avant, notre armée était comme une armée de rebelles, chacun portait la tenue qu’il voulait, la couleur qu’il voulait. Mais nous avons constaté qu’aujourd’hui, l’armée est en uniforme, ça c’est une très bonne avancée. Il y a un élagage au niveau de l’armée, les personnes vieillies ont été mises à la retraite et des jeunes ont été recrutés. L’armée est en train de se professionnaliser. Voilà en termes d’actions positives, ce que nous avons constaté », a indiqué ce leader politique.
Toutefois, l’ancien député souligne que tout n’est pas rose. Il relève deux aspects qui méritent plus d’efforts de la part des autorités. « Premièrement, sur le plan social, il y a le fait que les enseignants contractuels qui se sont sacrifiés de manière patriotique, ils sont venus à la rescousse de l’éducation pendant deux, trois ans, jusqu’à présent, ils ne sont pas mis dans des conditions idoines, ils n’ont même pas récupéré leur dû. Ça, c’est une action négative qu’il faut dénoncer et il faut proposer des solutions. La solution, c’est que le gouvernement n’a qu’à donner priorité au règlement de ces enseignants contractuels.
Deuxièmement, sur le plan politique, même si nous avons aujourd’hui un cadre de dialogue, mais tant que tous les Guinéens qui sont à l’étranger ne viennent pas autour de la table, qu’on ne crée pas les conditions pour qu’ils viennent autour de la table, eh bien il reste quelque chose à gagner. C’est des Guinéens aussi qui ont les mêmes droits et les mêmes devoirs que nous. Ils sont nombreux, alors il faut tenir compte de ça. Faire en sorte qu’ils viennent participer au dialogue, parce que pour nous, il n’y a pas autre solution que le dialogue. Car même les guerres les plus atroces, se sont tous terminées autour de la table. Pour nous, jusqu’à présent, il reste beaucoup à faire dans ce domaine, et c’est un point noir ».
En ce qui concerne la mise en œuvre du chronogramme de la transition, qui constitue aujourd’hui la préoccupation majeure des acteurs politiques, le président de l’ACP se montre sceptique quant au respect des délais indiqués. « Sur le plan du retour à l’ordre constitutionnel, objectivement nous constatons que les 24 mois, avec les conditions posées par le CNRD, c’est-à-dire les dix points à exécuter au pied de la lettre avec le budget de six cent millions (600 000 000) de dollars, si cela reste comme tel, il y aura forcément un glissement (de calendrier).
Parce que quoi que le gouvernement ait mobilisé cent millions (100 000 000) de dollars, dans les conditions actuelles, le gouvernement ne peut pas mobiliser les cinq cent autres millions de dollars qui restent. Et je ne vois pas aujourd’hui avec la guerre russo-ukrainienne, la guerre au Soudan, les différents coups d’État au Niger et au Gabon, avec l’instabilité qu’il y a en Asie, que l’Occident mette la main à la poche pour donner cinq cent millions de dollars pour soutenir quelque transition que ce soit en Afrique. Donc, le CNRD a un point à résoudre, car il risque de devenir un point noir », a laissé entendre Dr Ben Youssouf Keïta.
Mamadou Macka Diallo
666 660 366