,

Faranah-Dinguiraye: le Premier ministre fait un constat alarmant sur des chantiers publics 

Conakry- Dr Bernard Goumou était face à la presse ce mardi 21 février 2023. Objectif, faire le compte rendu de sa récente tournée qui l’a conduit à Boké, Faranah, Kissidougou et Dinguiraye du 16 au 20 février 2023. C’est un Premier ministre “écœuré”, “choqué”, “frustré” et “triste” qui s’est adressé aux hommes de médias.

Entre travaux inachevés, contrats non exécutés, ignorance des dirigeants locaux, Dr Bernard Goumou a eu une dose de déceptions et de surprises dans la région de Faranah où il dit s’être rendu sur 17 chantiers très importants. Mais, très sincèrement, avoue-t-il, le constat fait est alarmant.

«J’ai eu mon premier choc sur la route Mamou-Faranah. Rien n’est fait dans le cadre du contrat des travaux d’urgence de la réhabilitation et la construction de cette route. Pourtant, deux entreprises ont bénéficié des avances de démarrage des travaux. Mais, aucun dispositif en place, absence totale de base vie, pas une seule machine sur le terrain. Le projet d’extension de l’hôpital régional de Faranah est à l’arrêt depuis cinq mois, par manque de financements. Ce qui est aussi écœurant, dans les projets de ce type à l’intérieur du pays, c’est que les autorités locales qui sont les gouverneurs, les préfets, les sous-préfets ne sont au courant de rien. Les contrats sont attribués à des entreprises ici, à Conakry. Elles font ce qu’elles veulent sans aucune tutelle sur place pour assurer le minimum de suivi des chantiers.

Par exemple, à Dinguiraye, je me suis rendu sur le chantier de réhabilitation d’une route de 63 km, dans la commune rurale de Lansanaya-Gagnakaly, pour une durée contractuelle de sept mois, une avance de démarrage de 20% payée depuis plus d’un an, le niveau de réalisation des travaux sur le terrain n’est que 5%.

Il est à noter que les informations fournies par les entreprises qui sont parvenues à démarrer un projet ne concordent pas avec les réalités sur le terrain. Le cas frappant, c’est le cas de l’hôtel des finances publiques de Faranah. C’est vraiment un exemple édifiant. Le taux de réalisation physique réel sur le terrain 33%, taux validé consigné dans les rapport de missions 58%, le taux de décaissement est de 60%, une aberration totale.

À Kissidougou, plusieurs chantiers connaissent un important retard. Le chantier de construction par exemple du tribunal de première instance, le chantier de l’église St Louis de Kissidougou où nous avons accordé trois mois supplémentaires sur le champ, à l’entrepreneur. Ce chantier qui était signé pour 17 semaines, traîne depuis 2019. La notabilité de Kissidougou m’a interpellé et elle espère une nouvelle pose de pierre pour le projet de construction de la route Kissidougou – Kankan, attribuée à la société EBOMAF d’alors. Un projet qui porte sur 194 km, lancé en juin 2014, pour une durée d’exécution de 12 mois, puis prolongé en septembre 2015, pour une durée d’exécution de 38 mois. Des paiements importants, des avances de trésoreries ont été consenties en faveur de cette entreprise et décaissées, pas moins de 60 millions d’euros. Mais à ce jour, il n’a pas été possible pour le ministère de tutelle de retracer les paiements effectués, à travers la chaîne de paiements.

À Dabola, j’ai été interpellé sur la situation du barrage hydroélectrique de Tinkisso qui alimente les villes de Dabola, Dinguiraye et Faranah en électricité et en eau potable. Je me suis rendu sur les installations. La retenue d’eau est remplie de sable et de boue. Il faut très rapidement la curer.

Le gouvernement, par le biais du ministère en charge de l’énergie et sur instruction du chef de l’État va intervenir dans les mois à venir pour maintenir la production de ce barrage opérationnel depuis 1974.

Mais, il convient de s’interroger de la responsabilité de nos sociétés publiques d’État: la SEG et l’EDG qui exploitent ce barrage et qui ne sont pas en mesure de le curer. Il faut toujours l’intervention de l’État.

La cité Niger de Faranah, très bel ouvrage mais un serpent de mer qui a besoin d’un avenant pour rendre cette infrastructure disponible.

Le projet du village durable de Banko est aussi dans la prolongation de trois mois de contrat, bien avant notre arrivée », a longuement expliqué Dr Bernard Goumou.

Suite à ce constat alarmant, le Premier ministre a tiré quelques conclusions. Il se dit convaincu que le retard de la Guinée est dû en grande partie à l’exécution des contrats d’Etat en particulier des contrats d’infrastructures.

“Les marchés sont attribués à des entreprises sans capacité financière. Les marchés ont été attribués à des compatriotes, fils de ce pays, sur des critères de militantisme politique, maintenant que les décaissements sont faits,  seul un suivi régulier nous permettra de faire sortir ces projets du sol. Les gouverneurs, les préfets les sous-préfets et les services d’inspection n’ayant pas connaissance des contrats exécutés sur leur propres territoires juridiques. Ils restent étrangers aux investissements publics, les entrepreneurs font de l’argent public ce qu’ils veulent. Plusieurs projets sont ainsi à la traîne ou gelés sans que personne ne puisse dire quoique ce soit. Les bureaux de contrôle et de suivi sont à Conakry et les travaux sont réalisés à l’intérieur”, a t-il indiqué.

Pour pallier à tout cela, le Premier ministre compte renforcer le suivi et le contrôle des projets, renforcer l’autorité de l’Etat en replaçant les gouverneurs et les préfets au cœur du développement à la base, assurer la communication de l’administration sur les contrats.

Au cours de son séjour, le Premier ministre a aussi inauguré le commissariat central de Dabola avec le ministre de la Sécurité et de la Protection civile, le poste de santé de Kankanfoudé, la pause de la première pierre pour la construction du village artisanal de Faranah avec le ministre en charge de la Culture.

Pour clore, Dr Bernard Goumou a laissé entendre que le vol de l’argent public ne restera pas impuni. Des mesures idoines seront prises pour que l’argent public revient dans les caisses de l’Etat.

Diop Ramatoulaye

666-75-16-10

Articles similaires