La CRIEF aura-t-elle tous les atouts de l’efficacité attendue d’elle ? (Par Cheick Oumar Traoré)

Le Président de la transition a créé une cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF) pour lutter contre toutes les formes de détournement de fonds et de corruption.

Cette juridiction spéciale qui est installée à Conakry sera chargée de réprimer toutes les infractions à caractères économiques ou financiers dans les services publics ou privés du pays.

Cette cour à travers sa chambre de poursuite et de jugement, s’intéressera aux dossiers de détournement et de corruption, tant dans l’administration publique que dans le secteur privé, d’un montant égal ou supérieur à 1 milliard de gnf.

Par ailleurs, les délits comme le vol, l’abus de confiance, le détournement de prêt, le blanchiment de capitaux ou encore l’enrichissement illicite relèveront aussi de la compétence de la CRIEF. Seront donc poursuivis tous ceux qui se sont rendus ou qui se rendront coupables de ces infractions qu’il s’agisse d’agents publics ou privés.

Le gouvernement de transition s’engage ainsi dans une logique de lutte contre la fraude économique et fiscale dans le pays, afin d’instaurer une culture de bonne gouvernance économique.

Au textuel, la Guinée compte   deux cours d’appels et dix tribunaux de première instance et vingt-six justices de paix transformables en TPI.

Il y a par ailleurs des tribunaux d’exception : les tribunaux pour enfants, les tribunaux de travail, le tribunal militaire, la cour constitutionnelle et la cour des comptes.

De ces juridictions, toutes fonctionnelles avant le coup d’Etat du 05 Septembre dernier avec un effectif en Magistrat pour tout le pays de plus de trois cent (300).

C’est avec cet arsenal que le pouvoir judiciaire fait face aux litiges de tous ordres dont notamment les infractions traditionnelles, un peu pour désigner le vol, l’abus de confiance, l’escroquerie, les infractions de sang etc…

Cette force de répression, à l’épreuve, s’est révélée impuissante pour plusieurs causes dont les plus élevées sont les suivantes : la corruption, la relative indépendance, la désuétude des textes, l’inconstance de la jurisprudence, le défaut de formation continue des Magistrats, la politisation à outrance du milieu judiciaire et aussi l’émergence de nouvelles infractions, pour prendre l’exemple de la cybercriminalité, le blanchiment de capitaux, le terrorisme et son financement, auxquels il faut ajouter toutes les infractions économiques et financières lesquelles de par leur mode de commission viennent des fois remettre en cause les principes sacro-saints du droit pénal ainsi que le droit processuel lui-même.

Arrivé au pouvoir en Septembre 2021, le Président de la transition Mamadi DOUMBOUYA affecté par ce diagnostic du secteur de la justice et ayant compris au même moment l’impact des infractions économiques et financières dans la débâcle guinéenne a considéré ce disfonctionnement comme un frein au développement de la Nation et a obtenu la création de la CRIEF.

Il faut signaler que  l’installation et le fonctionnement de la CRIET fera l’objet d’une appréciation mitigée. Tandis que les uns y verront un instrument nécessaire au regard des courageuses décisions qu’elle est censée rendre, lesquelles disciplinent notoirement les habitudes naguère criminelles, qui ont fait sombrer la Guinée, d’autres cependant, lui tireront à boulets rouges.

La Cour de Répression des Infractions Economiques et Financières (CRIEF) se révèle être une Cour très indispensable à l’Etat guinéen. Si les preuves de cette nécessité se trouvent pour l’essentiel dans le contexte de sa création, il n’en demeure pas moins avéré qu’elle a des fondements ayant pour appui les critiques ancestrales de la justice.

En Guinée, le droit pénal a toujours été confronté à la complexité des infractions dites économiques et financières pour lesquelles, la poursuite des auteurs a besoin de quelques particularités et de quelques spécificités dont l’efficacité requise échappe à la manière classique de mener les enquêtes.

Ces nouvelles formes d’infractions qui défient les règles de procédure ordinaires sont contemporaines et générées par les nouvelles formes de vies dues à l’abus de confiance, le détournement de prêt, le blanchiment de capitaux ou encore l’enrichissement illicite.

Pour un développement harmonieux, la Guinée en vue d’atteindre ses objectifs de bien-être de la population a besoin d’une Justice réellement indépendante, impartiale et dont les décisions sont rendues dans des délais raisonnables.

Par ailleurs, aucune juridiction ne peut prospérer si elle n’a la faveur de la volonté politique. Le président de la République et le Peuple de guinée ont accepté d’accompagner la CRIEF autant que celle-ci se distinguera par ses résultats objectifs

Pour rassurer et mériter la confiance des guinéens, la CRIEF doit faire preuve d’efficacité en traquant tous les délinquants en col bleu et ceux en col blanc.  C’est en cela que les infractions qui relèvent de la compétence de la CRIEF connaitront une chute dans les statistiques.

Pour réaliser des progrès dans le cadre de cette noble et salvatrice mission de la CRIEF, il faut prendre en compte certaines réformes dont entre autres :

  1. La qualité des magistrats qui animent la cour : Ils doivent être intègres, diligents et honnêtes; bref, ils doivent bénéficier, sauf preuve du contraire, de la présomption des qualités attendus d’un prototype de Magistrat. Ce qui rassure les justiciables ;
  2. Ils doivent avoir, pour les Magistrats qui y seront permanents une avance de connaissances sur les infractions relevant de la compétence de la Cour ;
  3. Les peines privatives de liberté infligées aux auteurs avérés doivent être réellement fortes et celles patrimoniales, presque systématiques.

Cheick Oumar TRAORE

Président de l’Upag Les Patriotes

reotracheick@gmail.com

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