LFI 2023: le gouvernement prévoit des recettes en hausse de seulement 6,15% avec un taux de pression fiscale de 12,5% (Rapport)

République de Guinée

Travail- Justice- Solidarité

 CONSEIL NATIONAL DE LA TRANSITION

N° 019Enregistré au Secrétariat Central du CNT sous le numéro 2222 du 08 décembre 2022

RAPPORT Fait Par la Commission du Plan, des Affaires Financières et du Contrôle Budgétaire portant sur le volet Recettes du Projet de la Loi de Finances Initiale 2023

Présenté par la Rapporteuse Générale, Honorable Fatima CAMARA

Décembre 2022

 Honorable Président du Conseil National de la Transition,

Honorables Conseillers,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Mesdames et Messieurs, en vos qualités, rangs, grades, tout protocole observé ;

 En référence à l’article 56 de la Loi Organique relative aux Lois de Finances, le CNT a entamé le12 décembre 2022 la procédure d’examen et d’adoption du projet de Loi de Finances Initiale 2023. Ce projet a été présenté au nom du Gouvernement, en séance plénière, par les Ministres de l’Economie et des Finances, du Plan et de la Coopération Internationale et celui du Budget. La politique monétaire, quant à elle a été déroulé par le Gouverneur de la Banque Centrale, le 15 décembre 2023.

Ces interventions ont porté essentiellement sur l’approfondissement de la mise en œuvre de la vision du Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD), en matière de gestion des finances publiques, pour doter notre administration publique de moyens indispensables à la promotion d’une gouvernance vertueuse, en vue d’un développement durable. Elles s’inscrivent également dans le cadre de la poursuite des objectifs de refondation de l’Etat promue par le Président de la Transition, Chef de l’Etat, Chef Suprême des Armées, Son Excellence Colonel Mamadi DOUMBOUYA.

Selon Monsieur le Ministre du Budget, l’élaboration du projet de loi de finances 2023 intervient dans un contexte caractérisé par :

  • la poursuite de la refondation de l’Etat et l’amélioration de la gouvernance publique;
  • l’accentuation des efforts dans la mise en œuvre des axes prioritaires définis par le CNRD dans la Charte de la Transition ;
  • la volonté d’apporter des réponses concrètes aux attentes et préoccupations de la population, consécutive à l’immersion gouvernementale à l’intérieur du pays ;
  • le ralentissement de l’économie mondiale suite à la crise Russo-Ukrainienne et aux effets de la COVID-19 ;
  • le resserrement progressif des conditions de financement des économies ;
  • la poursuite de la transition fiscale ;
  • la forte demande d’accès aux infrastructures et l’accélération du rythme de mise en œuvre des projets sur le plan domestique ;
  • l’engagement à soutenir l’activité économique et les ménages à travers la mise en œuvre du Plan de Relance Economique (PRE) ;
  • la poursuite de la mise en œuvre de la feuille de route du Gouvernement de la Transition opérationnalisé en Programme de Référence Intérimaire (PRI).

Quant aux objectifs de la politique budgétaire, ils découlent de la lettre de cadrage N°0346/CABP/SP.PM du 21 octobre 2022 de Monsieur le Premier Ministre, fixant les objectifs et les mesures spécifiques de l’élaboration du Projet de Loi de Finances 2023 ; ils visent à:

  • soutenir l’effort de mobilisation des recettes, en maîtrisant les exonérations et les manques subséquents ;
  • poursuivre et approfondir les réformes et mesures de sécurisation des recettes ;
  • déployer des plans de modernisation des régies financières ;
  • allouer 20% des dépenses de biens et services du budget des départements aux services déconcentrés ;
  • maintenir le caractère prioritaire des dépenses d’investissement en les portant au minimum à 25% des dépenses de l’Etat ;
  • doter les services régaliens de l’Etat, de moyens suffisants pour permettre la poursuite de la rectification institutionnelle ;
  • améliorer la qualité et le niveau des dépenses des secteurs de la santé et de l’éducation, qui devraient atteindre à moyen terme respectivement 13% et 15% du total des dépenses budgétaires, conformément aux engagements internationaux pris par la Guinée ;
  • garantir un niveau minimum de 10% des dépenses du budget de l’Etat en faveur du secteur du développement rural, en application des engagements de Maputo ;
  • poursuivre la réforme de l’administration à travers la maîtrise des effectifs et la masse salariale ;
  • garantir une plus grande efficacité des dépenses publiques, pour le bien-être de la population ;
  • encadrer les dépenses de pensions et celles de la société d’Electricité de Guinée (EDG) ;
  • abonder le fonds d’études et de contrôle de l’Administration et Contrôle des Grands Projets (ACGP) à hauteur d’au moins 5% du coût des investissements, pour faciliter la réalisation des projets présidentiels prioritaires d’investissement dans un délai de 24 mois ;
  • limiter le déficit budgétaire à 4,5% du PIB ;
  • privilégier les emprunts à taux concessionnels, afin de contenir l’endettement public à un niveau soutenable pour l’Etat et pour l’économie.

Ainsi, les projections budgétaires pour 2023 des recettes, des dépenses et du financement, tablent sur :

  • un taux de croissance économique de 5,7% du PIB ;
  • un taux d’inflation moyen de 10,3% du PIB;
  • un taux de pression fiscale de 12,5% du PIB;
  • des réserves de changes correspondant à au moins trois (3) mois d’importations;
  • un taux de change de 8 867,2 FG pour 1 Dollar.

Les grandes masses du PLFI 2023 se résument ainsi qu’il suit, en Milliards de francs Guinéens :

  • Recettes totales : 27 910,95 Mds 
  • Recettes hors Dons : 26 441,64 Mds 
  • Dépenses :    36 106,74 Mds

Le besoin de financement est de 8 195,79 Mds, couvert par la différence entre les ressources de financement de 24 082,73 Mds et les charges de financement de 15 886,94 Mds.

Honorables Conseillers Nationaux,

Conformément à l’article 58 de la LORF, il est à rappeler que l’examen d’un projet de Loi de Finances exige l’adoption préalable du volet recettes avant celle de la partie dépenses et du rapport final.

Ainsi, les recettes attendues pour 2023 sont estimées à 27 910,95 Mds contre une prévision de 26 292,78 Mds dans la LFR 2022, soit une augmentation de 1 618 ,17 Mds (6,15%).

Les recettes ainsi prévues se résument selon le tableau ci-après :

Rubriques LFR 2022 (1) PLF 2023 (2) Écart

(2 – 1)

Part Accrois.
Recettes 26 292,78 27 910,95 1 618,17 100,00% 6,15%
Recettes fiscales 23 583,53 24 848,21 1 264,68 89,03% 5,36%
Dons, legs et fonds de concours 1 152,37 1 469,31 316,94 5,26% 27,50%
Autres recettes 1 556,88 1 593,43 36,55 5,71% 2,35%

Ces recettes se décomposent en recettes fiscales pour 24 848,21 Mds (89,03%), des autres recettes pour 1 593,43 Mds (5,71%) et des dons, legs et fonds de concours pour 1 469,31 Mds (5,26%).

Les ressources des Budget d’Affectation Spéciale (BAS) sont évaluées à 1 285,91 Mds contre 1 168,45 Mds en LFR 2022 et se décomposent comme suit :

  • FNDL /ANAFIC.………………………………………………………….569,96 Mds ;
  • FODECCON………………………………………………………………342,21 Mds ;
  • FIM………………………………………….…………………………….189,97 Mds ;
  • FCE………………………………………………………………………..183,76 Mds.

Par ailleurs, les prévisions de recettes des régies financières dans le PLFI 2023 se répartissent en :

  • Direction Générale des Impôts : 13 518,80 Mds contre 12 352,60 Mds dans la LFR 2022, soit (9,44%) ;
  • Direction Générale des Douanes : 10 572,99 Mds contre 10 243,62 Mds en LFR 2022, soit (3,21%);
  • Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique : 2 349,85 Mds contre 2 215,18 Mds en LFR 2022, soit (6,08%).

 Honorables Conseillers Nationaux,

La réalisation de ces objectifs de recettes appelle à la modification de certaines dispositions fiscales et douanières dans le but :

  • d’accroitre la mobilisation des ressources propres à travers le renforcement du contrôle fiscal et la sécurisation des recettes de l’État par l’institution de la facturation électronique des transactions commerciales;
  • de faciliter la relance du secteur rural à travers l’exonération des importations d’intrants et matériels à usage agricole;
  • d’encourager l’entreprenariat local en gardant le taux du droit Unique d’Entrée (DUE) à 0% ;
  • de maintenir pour 5 années encore, les mesures de protection supplémentaire dans la mise en application du Tarif Extérieur Commun (TEC) de la CEDEAO ;
  • d’introduire l’exécution des projets et programmes d’investissement sous le régime d’Autorisation d’Engagement – Crédits de Paiement (AE/CP).
  • de permettre par arrêté du Ministre du budget les reports de crédits concernant les dépenses du Budget d’Affectation Spéciale (BAS) du Fonds Commun de l’Education (FCE).

Honorables Conseillers Nationaux,

Les discussions en commissions et en inter-commissions ont porté essentiellement sur :

  • la directive du Premier Ministre instruisant de porter la pression fiscale à 14,01% contre 13 % en LFR, prévue à 12,52 % dans le PLFI 2023 ;
  • le déficit budgétaire évalué à 4,13% du PIB dans la Situation des Opérations des Administrations Publiques (SOAP) contre 2,63% en LFR pendant que les critères de convergence de la CEDEAO sont à 3% du PIB ;
  • le taux de recouvrement des recettes de 68,07% comparé au faible taux d’exécution des dépenses de 45,86 % au 30 septembre ;
  • l’augmentation de l’allocation budgétaire de l’ANAFIC alors que les comptes des collectivités locales sont gelés ;
  • le passage de l’immatriculation temporaire des véhicules de trois ans à cinq ans ;
  • le faible niveau de prévision budgétaire pour les lignes :
  • droit d’enregistrement sur le marché FINEX ;
  • ristourne sur les jeux de hasards ;
  • taxe à l’exportation sur les substances minières autres que les pierres précieuses dans toutes les sociétés minières sauf la SMB ;
  • taxes sur la vente des produits miniers ;
  • droit de timbre à l’importation des véhicules d’occasion ;
  • TVA intérieure .
  • le manque de prévision budgétaire pour les lignes :
  • recettes exceptionnelles ;
  • taxe sur l’extraction des substances minières autres que les métaux précieux ;
  • amendes de Pêche ;
  • amendes et confiscations douanière ;
  • taxe sur l’exportation et la production artisanale de l’or et autres ;
  • taxes sur les jeux de hasard ;
  • contribution des forces de sécurité.
  • l’impact des nouvelles mesures de la LFI sur le niveau de mobilisation des recettes ;
  • le niveau d’implication du secteur privé dans le processus d’élaboration du budget ;
  • le mécanisme de perception de l’impôt sur les plus-values immobilières non professionnelles ;
  • l’outil de contrôle du droit unique d’entrée (DUE) ;
  • les recettes issues de l’exploitation de l’espace aérien et maritime guinéen ;
  • l’identification et la taxation des sociétés des eaux minérales et les recettes issues de l’exploitation des eaux souterraines ;
  • les recettes issues des tests PCR .

Honorables Conseillers Nationaux,

Les travaux en commissions et en inter-commission sur le PLFI 2023 ont permis aux Conseillers nationaux d’apporter des amendements, notamment :

  • l’inscription des amendes de Pêche  pour GNF 2 Mds ;
  • la revue à la hausse de la taxe sur l’exploitation artisanale de l’or de 60 Mds à 65 Mds ;
  • l’inscription des recettes issues des tests PCR pour 38 Mds ;
  • la corrections de la nomenclature de certaines inscriptions ;
  • la correction de certains chiffres relatifs au financement du déficit budgétaire ;
  • la revue à la hausse du budget du ministère de la santé ;
  • la revue à la hausse des redevances domaniales de 29 Mds à 35 Mds ;
  • la revue à la hausse des droits topographiques de 6 Mds à 10 Mds ;

Soit une hausse totale de 55 milliards, dont nous avons orienté 78% au ministère de la santé, plus précisément sur la ligne achat produits pharmaceutiques.

Honorables conseillers nationaux ,

A la suite d’enrichissants débats, les recommandations suivantes ont été formulées :

  • Prendre des dispositions idoines pour le paiement effectif de la redevance sur l’utilisation des eaux souterraines et superficielles par les exploitants ;
  • Mettre en place un mécanisme réel de perception des taxes payées par les entreprises de production des eaux souterraines au Trésor public ;
  • Poursuivre la récupération des restes à recouvrer auprès des entreprises redevables ;
  • Poursuivre la mise en place et la tenue à temps des Conseils d’Administration des Entreprises Publiques, en vue de rehausser le niveau des dividendes de l’État ;
  • Mettre en application la taxe sur les jeux de hasard, conformément aux dispositions de l’article 513 du Code Général des Impôts ;
  • Veiller au versement des recettes issues des contraventions de la police et de la gendarmerie au Trésor public et dématérialiser le paiement desdites amendes ;
  • Mettre en place les services déconcentrer de la Direction du Patrimoine de l’Etat et des investissements Privées en vue de sécuriser la mobilisation des redevances domaniales et des droits topographiques ;
  • Impliquer le patronat à la réorganisation du secteur informel afin d’élargir l’assiette fiscale ;
  • Éviter la prolifération des organismes publics qui pourraient avoir des objectifs similaires (ANAIM, SOGUIPAMI, FIM);
  • Mettre en place un nouveau dispositif de perception des recettes issues de la vente des vignettes en attendant l’opérationnalisation des paiements par voie électronique ;
  • Élaborer une note technique sur le permis d’importation et d’exportation de marchandises (DDI et DDE), ainsi que les contraintes liées à la mobilisation des recettes des régies ;
  • Inviter particulièrement la Direction Générale du portefeuille à adresser une note technique au Conseil National de la Transition sur le statut juridique de l’ARPT, de la SOGEB, de la GUILAB, de l’Office Guinéen des Chargeurs (OGC), de la LONAGUI et autres sociétés publiques;
  • Inviter la BCRG à fournir au CNT une note technique relative à la taxation des transactions financières des sociétés de téléphonie (Orange money, Mobile money …);
  • Encourager la digitalisation de recouvrement des recettes de l’État ;
  • Opérationnaliser la taxe sur l’exploitation artisanale de l’or ;
  • Revoir le nouveau statut du patrimoine bâti public ainsi que ses contrats de bail commercial, en vue du versement au trésor des recettes locatives recouvrées ;
  • Réviser les conventions de bail du patrimoine bâti public ;
  • Mettre en place une commission de révision des conventions et arrêtés conjoints de partage de ressource entre le Trésor public et les entités de l’Etat;
  • Verser sur le compte du trésor public les recettes locatives du patrimoine bâti public;
  • Taxer l’extraction des substances minières autres que les métaux précieux ;

Honorables Conseillers Nationaux,

Après avoir examiné sans complaisance le contenu du volet recettes du projet de loi de finances initiale 2023 et tenant compte des éléments de réponse apportés par les cadres techniques du ministère du budget à vos préoccupations, les membres de la commission du plan, des affaires financières et du contrôle budgétaire suggèrent à la plénière de bien vouloir adopter ce présent projet.

Par ailleurs, nous ne saurons terminer sans remercier chaleureusement les Ministres et leurs cadres pour leur disponibilité et la qualité des réponses fournies lors des débats en commissions et en inter-commissions.

C’est aussi le lieu de remercier non seulement le bureau du CNT à travers son président Dr Dansa Kourouma pour son accompagnement mais aussi vous nos collègues Conseillers nationaux pour vos différents apports lors de l’examen dudit volet recettes du PLFI 2023.

Monsieur le Président, Honorables Conseillers(ères), telle est la substance du présent rapport que la Commission a l’honneur de soumettre à votre haute appréciation.

Je vous remercie.

  La Commission      

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