« L’État est en droit de restreindre lorsque l’exercice des libertés porte à une atteinte grave à la paix et à la quiétude ». C’est ainsi que le ministre de la justice et des droits de l’homme justifie la restriction des libertés en cours en Guinée, avec la censure des médias et le blocage des réseaux sociaux.
Alphonse Charles Wright a été interpellé sur le sujet par le bâtonnier de l’ordre des avocats de Guinée, à l’occasion d’une cérémonie de présentation des vœux de nouvel an, ce vendredi 05 janvier 2023. Maître Mamadou Souaré Diop a rappelé que toute privation des citoyens de leurs droits de s’exprimer librement et de participer au débat public « est une violation des dispositions de la charte de la transition qui est notre loi fondamentale ».
En réponse, le garde des sceaux a laissé entendre que le brouillage des ondes de plusieurs radios et le retrait de certaines télévisions du pays du bouquet Canal+ ne constitue nullement une violation de la liberté de la presse. Selon lui, ces mesures prises par les autorités sont les conséquences des dérapages qui étaient constatés dans les médias concernés.
« L’exercice de la liberté d’expression et l’accès à l’information sont deux notions confuses, je sollicite à ce que vous voyiez pour connaître les réalités des autres pays avant de parler des nôtres, parce que cette comparaison nous permettra de prendre le paramètre du juste milieu pour pouvoir accrocher. J’ai dit au président de la République et aux membres du gouvernement que lorsqu’on gère un pays, on ne doit pas fuir les débats et on ne doit pas garder le silence. Il faut aborder le sujet et poser le diagnostic pour pouvoir avancer.
Monsieur le bâtonnier, le droit à l’information, c’est la possibilité de donner l’information à tous les citoyens. Ce n’est même pas aux journalistes seulement d’accéder à l’information publique auprès de tous les services, ce n’est pas un droit ou un monopole appartenant aux journalistes, que ça soit clair pour tout le monde. Tout citoyen ayant besoin de l’information concernant un service public a droit à accéder à cela, à la limite près des exceptions du secret d’État. Les gens pensent que les droits de l’homme c’est seulement l’État, alors que les droits de l’homme signifient aussi de respecter la loi.
Mais on occulte cette partie pour voir toujours que les droits de l’homme comme la perception obligatoire vis-à-vis de l’État. La loi sur la liberté de la presse est très claire, en Guinée la presse se crée librement, j’ai appris qu’il y a une panoplie de presse en ligne en Guinée, et personne ne peut dénuer cela. Au-delà de ça, le principe est très clair, nul ne peut restreindre cette liberté de la presse, sauf pour deux raisons majeures. Donc quand nous parlons des principes, qu’on essaie de ne pas occulter les exceptions. Sinon vous prendrez les principes comme les règles alors que c’est l’exception qui confirme la règle.
Nous avons prévu une rencontre avec les hommes de médias pour discuter en tant que ministre des droits de l’homme. Vous voulez exercer votre droit, je suis d’accord, mais l’exercice pause problème, parce que la liberté d’expression ne doit pas porter atteinte à la dignité des personnes. Vous êtes un père de famille, on dit que monsieur le bâtonnier est ceci dans un studio alors que vos parents et amis écoutent, et les gens ont confiance en vous vous (…) Beaucoup parmi ceux qui prennent aujourd’hui le micro ne sont pas journalistes, ils n’ont pas appris l’éthique et la déontologie. Cependant, on leur laisse les micro (…) Ça ce n’est pas la liberté d’expression, c’est l’abus de l’exercice », a déclaré le ministre.
Alphonse Charles Wright ajoute que « l’État est en droit de restreindre lorsque l’exercice des libertés porte à une atteinte grave à la paix et à la quiétude. Et la proportion avec laquelle les choses allaient, il fallait quand même mettre les points sur les i. Mais il faut que l’État et ces médias, nous nous retrouvions pour parler pour que chacun puisse connaître sa limite ».
Mamadou Macka Diallo