LONAGUI/Transfert ou monopole des jeux de hasard et d’argent: la résistance de Guinée Games au décret n’a aucun fondement juridique

L’analyse de Moussa Kalissa, Juriste 
 
À contrario des plumitifs, scribouillards, blogueurs de réseaux sociaux au service de Guinée Games, je note tout d’abord qu’il n’y a pas ce qu’ils veulent appeler « AFFAIRE LONAGUI – GUINEE GAMES ». Il y a simplement un Décret Présidentiel précédé hélas par des manquements à un contrat illégal que la LONAGUI doit appliquer. En réalité, la LONAGUI récupère une activité confiée à des prestataires défaillants dans le respect des termes des contrats passés.

I – Sur les Faits
En effet, suivant les dispositions des articles 1 et 28 du contrat de concession en date du 10 juillet 2001, la LONAGUI a accordé à la société GUINEE-GAMES une autorisation exclusive d’organiser et d’exploiter, pendant une durée de trois ans sur le territoire de la République de Guinée, les jeux de loteries portant sur le grattage et la loterie traditionnelle.
Ensuite, ledit contrat de concession a fait l’objet des avenants suivants :
– Une première prorogation de la durée du Contrat passant de 3 à 5 ans signé le 04 mai 2002  
– Le 17 octobre 2002, une seconde prorogation a porté la durée du contrat de 5 à 10 ans ;
– Enfin, le 18 avril 2011, un troisième avenant a reconduit la durée de 10 ans fixé par l’avenant du 17 octobre 2002.
Le 22 juin 2021, donc bien avant le Décret Présidentiel, la LONAGUI a notifié à GUINEE-GAMES dans un courrier officiel la cessation des activités du contrat de concession sur la base de manquements constatés dans l’exécution des obligations incombant à GUINEE-GAMES ;
Le 13 mai 2022, le décret D/ 2022/N 0236/PRG/CNRD/SGG, dans son article2, résilie tacitement le contrat de concession pour l’exploitation des jeux de loterie accordé à GUINEE GAMES. Ce décret a été aussi notifié au cocontractant par la LONAGUI.
Le 7 juin 2022, GUINEE-GAMES prétextant l’article 1101 du code civil de la République de Guinée et les dispositions de l’article 3.1 de l’avenant du 18 avril 2011 affirme qu’elle bénéficierait d’une reconduction tacite de sa concession.
Contrairement à ses allégations de pseudo juridiques, les faits prouvent que le contrat de concession entre la LONAGUI et GUINEE-GAMES est soumis à une double volonté de résiliation.
La première vient de la volonté de l’un des cocontractants. Il s’agit de la LONAGUI à travers le courrier de notification de cessation des activités de la concession en date du 22 juin 2021.
La deuxième volonté vient du Décret Présidentiel qui a mis fin à la concession de l’exploitation des jeux de loterie. Ce décret bénéficie des prérogatives de résiliation de tout contrat public même en l’absence de toute faute pour seul motif de l’intérêt général.  
À l’analyse de tout ce qui précède, le problème de droit est déjà résolu.  
  
II.​PROBLEME DE DROIT SOULEVÉ PAR LE LITIGE
 
La société GUINEE-GAMES peut-elle invoquer le non-respect des dispositions contractuelles relatives à la période de préavis pour obtenir la reconduction tacite de son contrat de concession ?
Vu les dispositions de l’article 3.1 de l’avenant au contrat de concession pour l’exploitation des jeux de loterie entre LONAGUI et GUINEE-GAMES, le décret D/ 2022/no 0236/PRG/CNRD/SGG peut-il résilier ledit contrat de concession ? 
 
III.​ELEMENTS DE SOLUTIONS APPORTES AU LITIGE
Pour toute réponse à la question ci-dessus, on est amené à qualifier la nature juridique du contrat de concession objet du litige.
Le cadre juridique du présent contrat de concession est composé des éléments ci après :
– les documents contractuels, 
– les dispositions légales 
– les dispositions règlementaires.
Les documents contractuels portent sur le contrat de concession pour l’exploitation des jeux de loterie ainsi que sur les avenants aux contrats de concession.
Les dispositions légales portent sur la loi fixant les règles régissant la passation, le contrôle et la régulation des marchés publics et délégation de service public.  
Les dispositions réglementaires portent sur le décret N° 0 028 du 18 mars 2000, le décret 0236 du 13 mai 2022 et l’arrêté 2540 fixant conditions d’application du décret D 2000 028 PRG SGG du 28 2000 portant création d’une société publique chargée de l’organisation, de la gestion et de l’exploitation de toutes les formes de loterie de jeux, de pronostics et assimilés en République de Guinée.
De l’analyse de ces différents documents et normes, on peut faire des observations suivantes :
1.​De la validité de l’avenant au contrat de concession du 18 avril 2011
 L’avenant du 18 avril 2011 n’a pas respecté la procédure de conclusion du contrat de concession. 
En effet, l’article 31 du contrat de concession pour l’exploitation des jeux de loterie que Guinée Games refuse de signifier à ses scribouillards en contrat circonstanciel de dénégation systématique du Décret Présidentiel stipule clairement : « le présent contrat de concession n’est valable qu’après approbation de Monsieur le Ministre de l’Economie et des finances ». 
 Ainsi, on comprend aisément que les dispositions de l’article 31 du contrat de concession ci-dessus posent comme condition sine qua non de sa validité, son approbation préalable par le ministre de l’économie et des finances. Sauf, preuve contraire à fournir par Guinée Games, la LONAGUI ne dispose pas à ce jour dans ses archives pourtant bien tenues aucun document mentionnant le quitus obligatoire du ministre des finances à cet avenant que ne cesse de brandir partiellement ou à moitié Guinée Games et ses alliés dans sa vaine résistance à l’application du Décret Présidentiel. 
Par conséquent, l’avenant au contrat de concession du 18 avril 2011 n’est pas valable. Même un élève de la maternelle ne peut ne pas comprendre cet argument juridique élémentaire. Donc, GUINEE-GAMES ne peut pousser l’ignorance ou la résister et l’invoquer devant la LONAGUI. 
Ensuite, l’article 29 du contrat de concession ajoute : « tout amendement afférent au présent contrat d’exploitation devra se faire par voie d’avenants dûment signés des parties ».
Dans ce présent contrat, les parties signataires sont les deux parties au contrat et l’autorité de tutelle financière (Ministre de l’économie et des finances). 
A ce niveau, la disposition qui pourrait être invoquée par GUINEE-GAIMES relative à la reconduction de son contrat est celle de l’alinea2 de l’article 28 du contrat de concession qui stipule : « il est renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation au cours de cette période par l’une des parties et annoncées un mois avant ».
2.​De la demande de reconduction du contrat de concession de GUINEE-GAMES
A la question, la société GUINEE-GAMES peut-il invoqué le non-respect des dispositions contractuelles relatives à la période de préavis pour obtenir la reconduction tacite de son contrat de concession ?
La réponse est non. En effet, les dispositions relatives à la procédure de résiliation ne peuvent être invoquées ou opposables qu’au cocontractant dans la seule hypothèse où le contrat existe. Dans le cas de figure qui nous intéresse, le contrat n’existe pas à cause de l’absence de l’objet du contrat. Le contrat qui lie les deux parties porte sur la concession. Par la publication du décret N• 0 0236, la concession de l’exploitation des jeux de loterie n’existe plus. Tout contrat sans objet est nul.
 
3.​Du régime juridique du contrat de concession objet du litige    
 
Le contrat de concession faisant objet du litige ne doit pas être pris sous l’angle du droit privé. Une société concessionnaire est soumise à deux droits. Il s’agit du :
-​Droit privé qui est appliqué pour ce qui concerne son fonctionnement, son organisation, et sa gestion. Dans ce cas, le droit OHADA est appliqué à GUINEE-GAMES ;
– Droit Administratif est appliqué pour ce qui concerne les relations avec l’Etat. Notamment les pouvoirs de contrôle, de direction, de sanction, de modification unilatérale et de résiliation pour faute ou l’absence de toute faute.
Ainsi, au sens de l’alinéa 3 de l’article 1er de la loi fixant les règles la passation, le contrôle et la régulation des marchés publics et délégations de service public dispose que : « Au sens de la présente loi, on entend par la délégation de service public, tout contrat par lequel une des personnes morales de droit public visées à l’article 3 ci-dessous confie la gestion d’un service public relevant de sa compétence à un délégataire dont la rémunération est liée ou substantiellement assurée par les résultats de l’exploitation du service. Les délégations de service public comprennent les régies intéressées, les affermages ainsi que les concessions de service public, qu’elles incluent ou non l’exécution d’un ouvrage. »
De cette définition, on comprend aisément que la délégation de service public porte sur trois éléments :
-​La régie intéressée
Est un contrat par lequel l’autorité contractante finance elle-même l’établissement d’un service, mais en confie la gestion à une personne morale de droit public ou de droit privé qui est rémunérée par l’autorité contractante, tout en étant intéressée aux résultats, que ce soit au regard des économies réalisées, des gains de productivité ou de l’amélioration de la qualité du service ;
 
-​L’affermage 
Est une convention par laquelle une personne morale publique (autorité affermante) confie l’exploitation d’un service public a une autre personne morale (fermier) après lui avoir remis les ouvrages nécessaires à cette exploitation. Le fermier verse en contrepartie des redevances à la personne morale publique contractante ;
-​La concession
La concession est un contrat administratif par lequel une collectivité publique, le « concédant », confie à une personne physique ou morale, le « concessionnaire », l’exploitation d’un ouvrage public ou l’exécution d’un service public avec le droit pour celle-ci, de se rémunérer par la perception de redevances sur les usagers de l’ouvrage ou sur ceux qui bénéficient du service public.
Il faut rappeler que dans le contrat administratif, l’administration dispose des prérogatives dont un simple particulier ne pouvait pas user. Parmi ces prérogatives, on peut citer le pouvoir de : 
-​Modifier unilatéralement les clauses contractuelles,
-​Contrôler son cocontractant ;
-​Sanctionner son cocontractant ;
-​Résiliation du contrat. Ce pouvoir de résiliation unilatérale dont dispose l’Administration n’est pas la résiliation sanction pour manquement à une obligation, mais la résiliation dans l’intérêt du service public. La résiliation dans l’intérêt su service public constitue une règle de droit commun des contrats administratifs.
En d’autres termes, la résiliation du contrat dans l’intérêt général du service public trouve son fondement dans l’idée de l’intérêt général.
 Mais, en contrepartie le cocontractant dispose d’un ensemble de droits et de garanties qui le couvre sur le plan juridique.
 
4.​Du décret mettant fin au contrat de concession pour l’exploitation des jeux de loterie
L’article 2 du décret D/ 2022/no 0236/PRG/CNRD/SGG dispose « A compter de la date d’entrée en vigueur du présent décret et sans préjudice des dispositions de l’article 1er , toutes les formes de loterie et pronostics notamment de paris sportifs, commercialisés en réseau physique de distribution, sont exclusivement organisés et exploités par la LONAGUI sur le territoire de la République de Guinée ». 
Le décret ci-dessus exclu du champ de la concession les activités liées à toutes les formes de loterie et de pronostics. Par conséquent, le service public de jeux et de loterie est désormais exploité par une personne publique.
Le décret ci-dessus impact le contrat de concession entre la LONAGUI et GUINEE-GAIMES, car le service public de jeux et de loterie était géré par une personne privée. 
 
5.​Du sort du contrat de concession pour l’exploitation des jeux de loterie entre la LONAGUI ET GUINEE GAMES 
Le sort du présent contrat de concession amène des observations :
1. La publication du décret N° 0236 rend le contrat de concession entre la LONAGUI et GUINEE-GAMES sans objet.
2. Les deux parties au contrat de concession sont devant une résiliation du fait de la puissance publique et en dehors de leur volonté. Les clauses de leur contrat de concession deviennent sans objet et non opposable ni aux parties, ni aux tiers.
2.​En cas de résiliation d’un contrat portant l’exécution d’un service public pour motif d’intérêt général, le cocontractant de l’administration bénéficie l’équilibre financier de son contrat (dommages et intérêts) ;
3.​Par le principe de continuité de service public, l’administration à l’obligation de faire fonctionner le service public en question ;
4.​Le présent contrat de concession est muet sur le sort des biens de l’entreprise à la fin de la concession. Devant ce silence, il est de droit d’appliquer le principe général relatif au sort des biens à la fin de la concession. Principe selon lequel, les biens de l’entreprise, en fin de concession entrent dans le patrimoine de l’Etat. 
 
De L’Intérêt Général 
 
 Les revenus de la Loterie sous toutes ses formes et dans tous les pays du monde servent à la Nation et non exclusivement à des individus d’où l’évocation de la notion de l’intérêt général. Qu’on arrête l’intoxication et la manipulation de l’opinion sur des prétendues actions d’utilité publique réalisées par Guinée Games. Que ses propagandistes montrent, avec la grande masse d’argent collectée durant les 20 ans de sa position de quasi monopole, quel établissement scolaire, quel centre de santé a été construit ou réhabilité dans une ville ou village Guinéen par GUINEE-GAIMES; une piste rurale reprofilée, une maison de jeunes offerte ou aménagée par Guinée Games sur toute l’étendue du territoire national ; le financement d’un projet d’utilité publique d’une association de jeunes ou d’un groupement de villageois par GUINEE-GAIMES. 
À partir du 13 août 2022, les revenus générés par la LONAGUI, conformément à la lettre et à l’esprit du Décret Présidentiel, profiterons aux parieurs, aux travailleurs revalorisés et à l’intérêt général à travers le financement par l’Etat Guinéen des projets et programmes d’utilité publique partout sur le territoire national.
 
Conclusion
Au vu de ce qui précède, il n y’a pas de litige contractuel entre la LONAGUI et son contractant GUINEE-GAMES pour cause de résiliation. La résiliation est faite de plein droit par l’autorité compétente.
Le décret D/ 2022/no 0236/PRG/CNRD/SGG /CNRD/SGG doit être appliqué à Guinée Games.

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