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Mines-Un ministre d’Alpha Condé brise le silence: «que nos successeurs ne jettent pas le bébé avec l’eau du bain» (Décryptage)

Conakry-Dans un livre de 242 pages dont Guinee114.Com s’est procuré copie et qui pourrait être dédicacé les jours à venir, l’ancien ministre en charge des Mines, Abdoulaye Magassouba, s’est exprimé. Dans cet ouvrage intitulé «Les Mines Guinéennes : Réalités, Défis et Perspectives», qui est édité dans un contexte où les ministres du dernier gouvernement d’Alpha Condé, sont comme contraints au silence, leurs documents de voyage confisqués, l’auteur évoque ses cinq ans à la tête de ce département qu’il a quitté brutalement, comme tous les autres membres du gouvernement, suite au coup d’Etat survenu le 05 septembre 2021.

Parmi les 22 sous-titres traités dans son livre pour aborder les réalités, les défis et les perspectives du secteur minier guinéen, le désormais ancien ministre des Mines et de la Géologie, Abdoulaye Magassouba, parle notamment de la problématique de transformation locale de la production minière, des investissements dans le secteur, des négociations, des revenus miniers, de la corruption, de la recherche géologique, des trafics d’influences, des intimidations, des coups bas de chasseurs de postes et de leurs parrains…et des perspectives, chiffres à l’appui.

Dans la posture de premier avocat de la gouvernance du secteur minier sous Alpha Condé, Abdoulaye Magassouba affirme que «tout a été fait au cours des dernières années pour que le secteur minier décolle…Les résultats aujourd’hui et les perspectives encourageantes sont le fruit d’efforts inlassables  des acteurs, même si beaucoup, peut-être par impatience, ne réalisent pas encore les progrès réalisés dans le secteur minier guinéen».

Alors que beaucoup dénoncent l’exportation massive de la bauxite brute, reprochant au gouvernement de laisser ainsi s’échapper plusieurs opportunités notamment d’emploi,  Abdoulaye Magassouba reconnait que la transformation locale est mieux mais, «il faut cependant avoir à l’esprit que les raffineries modernes emploient de moins en moins du fait de l’automatisation de plus en plus avancée de la chaine de production».

Plus loin, toujours sur ce sujet, l’auteur indique que «La délocalisation des raffineries en Guinée, même si elle est financièrement bénéfique pour les sociétés, ne peut se concrétiser efficacement que si le pays crée des conditions compétitives d’accès à la main-d’œuvre qualifiée, aux intrants et à l’énergie». Des conditions que la Guinée ne remplit pas pour le moment. Puisque, parlant de l’énergie par exemple, l’auteur mentionne à la page 217 de son livre que «si l’énergie produite par le Konkouré devait servir dans le processus de transformation, la réalisation complète des barrages du système Konkouré (Garafiri, Kaleta, Souapiti et Amaria) ne permettrait pas de couvrir tous les besoins»

S’il reconnait que «malgré les progrès significatifs réalisés, tout n’a pas été parfait et parachevé ni même entamé dans certains cas», le dernier ministre des Mines d’Alpha Condé trouve une formule pour justifier cela. Selon lui, c’est parce que «le chantier était vaste mais aussi parce que chaque période a ses priorités, ses contingences et ses contraintes».

Partant sur la base des réformes engagées et des paramètres de projets en cours, l’ancien ministre projette un tableau d’un secteur minier guinéen se portant encore mieux les dix prochaines années. «Les revenus miniers devraient passer de 435 millions de dollars US en 2018 à un niveau stable à plus 600 millions de dollars US en 2025 puis au moins à un milliard de dollars US en 2030», affirme Abdoulaye Magassouba dans son  tableau «idyllique» de projection réalisable, selon lui, «à condition que la Guinée connaisse une bonne période de paix et de stabilité, que la gouvernance du secteur minier continue de s’améliorer avec une meilleure collecte et une meilleure utilisation des revenus».

Des conditions qui ne semblent pas se retrouver dans la vision du nouveau ministre des Mines du gouvernement de transition, qui a vite annoncé la révision de certaines conventions minières et le retrait de titres miniers.

Comme s’il avait besoin de parler directement à son successeur, au nouveau ministre des Mines qui l’a remplacé sans la traditionnelle cérémonie de passation de service, le désormais ancien ministre déclare dans son livre : «Ce que nous avons accompli doit être consolidé et, bien sûr, amélioré pour maintenir le cap. Pour cela, il faut certainement que nos successeurs, comme le dit le dicton populaire «ne jettent pas le bébé avec l’eau du bain».

Dans ce livre, il s’agit aussi d’anecdotes et de questions personnelles quoique, tel un homme qui marche sur des œufs, l’auteur s’est efforcé à ne pas mettre sur la place publique des secrets d’Etat ou commerciaux, lui qui a quitté ses fonctions il y a moins de quatre mois.

«J’ai aussi choisi de servir chaque instant dans la dignité, avec dévouement, avec loyauté à la mission qui m’incombait. Les seuls combats que j’ai menés, en dehors de servir, étaient ceux destinés à défendre ma dignité  et ma réputation, parce que j’ai toujours estimé –et c’est le cas encore et pour toujours- que mon meilleur capital était mes relations (…) Il y avait pourtant de quoi faire entre menaces, intimidations, trafics d’influences, actions frauduleuses de certains acteurs indélicats, coups bas permanents des chasseurs de postes ou de leurs parrains en passant par des difficultés techniques et administratives», dévoile Abdoulaye Magassouba.

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Thierno Amadou M’Bonet Camara (Rescapé N°4)

622 10 43 78

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