Prétendu soutien à la liberté de la presse : escobarderie et opportunisme politique encombrants…

« Et ne donne pas ta confiance au premier venu » ! A travers cette leçon de vie dans son œuvre « L’Enfant Noir », Camara Laye de Kouroussa ne faisait pas que nous recommander la prudence. Bien plus, le sage qu’il est nous prévenait aussi contre ceux qui profiteraient de notre peine soit pour abuser de notre naïveté ou en faire un tremplin pour atteindre leur objectif inavoué. Beaucoup fournissent de l’effort sans réussir à ne pas douter de la sincérité des déclarations du trio UFDG-RPG-UFR par rapport à leur prétendu soutien à la liberté de la presse fortement éprouvée ces derniers temps.

Il y a bel et bien des soutiens qu’on ne voudrait pas. Depuis quelques jours, face à l’attitude belliqueuse de certaines autorités apparemment décidées à en découdre avec la presse, les condamnations fusent de partout. Il n’y a l’ombre d’aucun doute sur le fait que ces autorités, citées ou pas, qui tentent de torpiller la liberté de la presse, sont dans une entreprise honteuse vouée à l’échec.

Le site Guineematin dont l’accès est toujours restreint, la brutalité dont nos confrères ont été victimes lors d’une manifestation pacifique en guise de protestation, sont des situations qui ne peuvent plaire qu’à ceux qui ont leur propre agenda pendant cette transition, en faisant semblant d’accompagner le colonel Mamadi Doumbouya. Ceci est une vérité implacable. Là donc n’est pas le débat.

En plus des déclarations de condamnation de la part des responsables du trio RPG-UFDG-UFR, le parti de Cellou Dalein Diallo, lui, a poussé l’expression de « son soutien » et de sa « solidarité » jusqu’à annuler son assemblée générale de ce weekend.

Mais un regard dans le rétroviseur impose un sentiment de doutes quant à la sincérité de ce soutien à la presse. Entre la fin de la transition dirigée par le CNDD (2010) et celle en cours depuis le 21 septembre 2021, ces trois partis ont en commun le fait d’avoir relégué la question de la liberté de la presse au second plan. C’était le cadet de leurs soucis. Pourtant, chacune de ces trois grandes formations politiques a eu un groupe parlementaire à l’Assemblée nationale. Ils ont gouverné ensemble parfois même au niveau de l’exécutif. Mais jamais la liberté de la presse n’a été leur priorité. Jamais !

La famille du journaliste Mohamed Koula Diallo ne sait toujours pas qui est l’auteur du tir qui a tué leur fils devant le siège de l’UFDG en février 2016. La justice sous le règne d’Alpha Condé n’a condamné personne pour ce meurtre. Cette affaire illustre éloquemment la passivité de monsieur tout le monde à l’époque devant les crimes commis contre les journalistes.

Ce que ces trois partis politiques ont fait, c’est d’instrumentaliser la presse quand ils ne s’entendaient pas dans le partage du gâteau ou de remettre publiquement en cause le principe de dépénalisation des délits de presse quand celle-ci se montrait gênante. Qui n’a pas entendu Alhousseny Makanéra Kaké, ministre d’Alpha Condé, fustiger l’existence d’une loi qui protège les journalistes ?

Cellou Dalein Diallo, Sydia Touré, Alpha Condé et leurs groupes politiques respectifs n’ont pas la légitimité de se présenter aussi subitement comme des alliés dub combat pour la liberté de la presse. Ils ont toute la légitimité et absolument le droit d’affronter politiquement leur adversaire commun du moment : le CNRD soupçonné à tort ou à raison de vouloir confisquer le pouvoir. Mais transformer la lutte pour la liberté de la presse en ring politique, c’est de l’opportunisme inacceptable. La bataille pour la liberté de la presse ne devrait pas être souillée par sa politisation.

Toutefois, la plus grosse erreur serait pour les autorités en place, de considérer ces déclarations de soutien comme l’illustration d’une complicité entre la presse et cette opposition. Le colonel Mamadi Doumbouya devrait savoir qu’on ne traite pas la presse comme on le ferait avec son opposition. Les journalistes ne sont ni des adversaires ni des opposants. Qu’il agisse donc pour que le site Guineematin soit libéré et qu’un terme soit mis à toute cette animosité regrettable dressée contre la presse.

Thierno Amadou Camara

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