Alors que les débats ont été clôturés dans le procès de l’adjudant-chef Ibrahima Baldé, la partie civile décide de se retirer de la procédure. Maître Thierno Souleymane Baldé, le conseil des plaignants, a annoncé cette décision à l’issue de l’audience de ce lundi, 23 octobre 2023. Il proteste ainsi contre le manque d’objectivité dans la conduite de la procédure et le refus du parquet d’agir dans le sens de la manifestation de la vérité. En effet, l’avocat a sollicité aujourd’hui un transport judiciaire sur le terrain pour vérifier les propos tenus par l’accusé et son supérieur hiérarchique à la barre, mais sa requête a été rejetée.
« Nous nous battons pour la manifestation de la vérité. Dans les conditions normales, lorsqu’il y a un assassinat, les officiers de police judiciaire et le parquet se déplacent pour aller sur le terrain et essayer de recueillir tous les indices qui pourraient permettre l’identification des auteurs. (…) Une fois que les plaintes sont déposées, au niveau de l’enquête préliminaire, il y a la nécessité d’entendre tous les témoins potentiels et éventuellement faire une analyse balistique. Nous savons que ces analyses ne sont pas possibles au niveau de la Guinée, mais le minimum que l’on puisse faire, c’est quand même d’entendre les différents témoins.
Au-delà de l’enquête préliminaire, lorsque le dossier est orienté au niveau du juge d’instruction, il doit quand même instruire à charge et à décharge. Il doit réunir les éléments de preuves qui peuvent démontrer soit la culpabilité ou l’innocence de la personne concernée. Mais si le travail est bâclé à ce niveau, on vient au niveau du tribunal criminel, on veut d’une certaine manière faire croire que la procédure a été juste et équitable et que la décision qui est prise se justifie sur le plan légal, nous ne pouvons pas cautionner une telle procédure. Nous avons demandé qu’il y ait un transport judiciaire, ils ont rejeté notre requête. (…)
Donc nous avons décidé de ne plus nous associer à la procédure en cours, nous ne viendrons pas plaider ici. Nous allons attendre qu’ils donnent leur décision et nous allons déposer une déclaration d’appel contre la décision qui sera prise. Et si effectivement il y a la volonté de veiller à ce que la procédure soit faite correctement, ça sera au niveau de la Cour d’appel. Sinon, comme les parents des victimes l’ont dit devant vous ici, ils préfèrent se contenter de la justice divine. Nous, parties civiles, nous défendons nos intérêts. Si le parquet constitue un élément obstacle au niveau de la manifestation de la vérité, si nous constatons que la procédure n’est pas objective, nous n’avons absolument aucun intérêt à cautionner une telle chose », a déclaré maître Thierno Souleymane Baldé.
L’adjudant-chef Ibrahima Baldé est poursuivi dans cette affaire pour des faits de « meurtre, atteinte à la vie, et coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner ». Des accusations qui font suite à une manifestation appelée par le FNDC le 20 octobre 2022, au cours de laquelle l’agent avait été filmé en train d’utiliser son pistolet pour faire des tirs à Bambéto Magasin. Trois jeunes avaient été tués ce jour-là et le lendemain sur l’Axe le Prince.
A l’ouverture de son procès, le 19 juin dernier, l’accusé avait rejeté en bloc les faits mis à sa charge. Ibrahima Baldé a reconnu avoir utilisé son arme lors des opérations de maintien d’ordre, mais il a assuré que c’était uniquement pour faire des tirs de sommation en vue de dissuader un manifestant qui détenait aussi une arme à feu. Il a laissé entendre que son arme ne pouvait d’ailleurs pas tuer quelqu’un qui était distant de sa position, comme c’était le cas ce jour-là. Son supérieur hiérarchique, le lieutenant Aboubacar Keïta, qui a comparu en qualité de témoin, a confirmé cette version.
Mamadou Macka Diallo
666 660 366