Après plusieurs reports, le procès de l’adjudant-chef Ibrahima Baldé s’est poursuivi ce lundi, 23 octobre 2023, devant le tribunal criminel de Dixinn. Cette audience a connu la comparution en qualité de témoin du lieutenant Aboubacar Keïta, commandant de l’unité d’intervention dans laquelle se trouvait l’accusé le jour où les faits qui lui sont reprochés ont eu lieu.
A la barre, l’officier de la gendarmerie a fait savoir qu’il n’a pas donné l’ordre à son subordonné de tirer des coups de feu lors des opérations de maintien d’ordre suite auxquelles il a été arrêté. Il indique aussi n’avoir pas vu l’adjudant-chef Ibrahima Baldé faire ces tirs, parce qu’ils n’étaient pas au même endroit au moment des faits. Selon lui, c’est à travers la vidéo publiée sur les réseaux sociaux qu’il a appris que son agent détenait une arme à feu.
« À midi, on m’a dit qu’il y a un tireur dans la foule, j’ai dit à tout le monde de se mettre à l’abri. Ibrahima Baldé a quitté ma position, il a pris l’initiative d’aller approvisionner une équipe qui était en besoin de gaz lacrymogène. Après, quand j’ai vu la vidéo sur les réseaux sociaux, je lui ai demandé s’il a vu la vidéo, il m’a dit oui, que sa famille l’a appelé (…). Je lui ai demandé qu’est ce qui s’est passé ? Il m’a dit : je suis allé approvisionner une autre équipe en besoin de gaz lacrymogène, à mon retour, j’ai rencontré le tireur, il m’a tiré dessus. Je me suis mis à l’abri et j’ai riposté », a-t-il expliqué, ajoutant que la première mesure qu’il a prise, c’est de récupérer l’arme et la consigner à la base.
L’adjudant-chef Ibrahima Baldé est poursuivi dans cette affaire pour des faits de « meurtre, atteinte à la vie, et coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner ». Des accusations qui font suite à une manifestation appelée par le FNDC le 20 octobre 2022, au cours de laquelle l’agent avait été filmé en train d’utiliser son pistolet pour faire des tirs à Bambéto Magasin. Trois jeunes avaient été tués ce jour-là et le lendemain sur l’Axe le Prince.
A l’ouverture de son procès, le 19 juin dernier, l’accusé avait rejeté en bloc les faits mis à sa charge. Ibrahima Baldé a reconnu avoir utilisé son arme lors des opérations de maintien d’ordre, mais il a assuré que c’était uniquement pour faire des tirs de sommation en vue de dissuader un manifestant qui détenait aussi une arme à feu. Il a laissé entendre que son arme (PA TT30) ne pouvait d’ailleurs pas tuer quelqu’un qui était distant de sa position, comme c’était le cas ce jour-là.
Une version qui a été confirmée par le lieutenant Aboubacar Keïta. Ce dernier a assuré qu’il est impossible que le pistolet que détenait l’accusé puisse tuer quelqu’un se trouvant à trois mètres de sa position. D’ailleurs, précise-t-il, le canon du pistolet était dirigé vers Kakimbo, ce qui veut dire qu’il ne pouvait pas tuer quelqu’un qui se trouvait vers Koloma. Parlant de la détention de l’arme par son agent sans même qu’il n’en soit informé, l’officier a fait savoir que la loi sur le maintien d’ordre autorise les agents de la gendarmerie de porter des armes à feu.
Après le témoignage du lieutenant Aboubacar Keïta, l’avocat de la partie civile a sollicité un transport judiciaire sur le terrain pour vérifier ses déclarations. Mais le ministère public et la défense se sont opposés à cette demande, estimant que cela n’est pas nécessaire pour la manifestation de la vérité. Finalement, le tribunal a rejeté la demande de la partie civile et renvoyé l’affaire à deux semaines pour les réquisitions et plaidoiries.
Mamadou Macka Diallo
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