Le document de programmation budgétaire pluriannuelle 2024-2026 présenté par le gouvernement cette semaine devant les membres du conseil national de la transition (CNT) continue de susciter de réactions. Interrogé dans la soirée de ce vendredi 18 août 2023 par un journaliste de guinee114.com, Docteur Alhassane Makanéra Kaké, juriste spécialiste de finances publiques a émis des craintes.
« Les montants par rapport à la programmation budgétaire sont très élevés mais notre inquiétude, c’est les sources de financement. Nous constatons que ces montants ne sont pas prélevés dans le revenu national. C’est ce qui fait que nous avons de craintes. Si à peu près 57% sont supportés par l’extérieur, ça signifie que l’on ne maîtrise pas ce type d’investissement. À tout moment, l’aide extérieure peut bloquer. Deuxièmement, nous ne connaissons même pas les conditions des emprunts de ces 57% d’investissement. C’est ce qui nous amène à émettre des inquiétudes. Franchement, on ne fait que des interrogations.
Si vous vous rappelez, pendant des années, les financements guinéens ont été financés à hauteur de 85% par l’extérieur. Aujourd’hui on mène à 57%, c’est ce qui veut dire que le gouvernement a beaucoup à faire parce qu’on est pas encore maître de nos investissements. Avec 43%, on ne tappe pas la poitrine pour dire qu’on est souverain. Donc, sur le plan d’investissement, on n’a pas de souveraineté à présenter ou à défendre« , a-t-il entamé.
Malheureusement, poursuit-il, en Guinée, il y a toujours des prévisions optimistes mais rarement qu’on puisse les atteindre.
« Je dirais qu’on peut prélever un tel budget en Guinée à condition que les recettes soient sécurisées et qu’on puisse les comptabiliser. Malheureusement, une bonne partie des ressources publiques en Guinée ne sont sécurisées, ni comptabilisées. Ou bien la Guinée a les capacités qu’à même de recouvrer un tel montant. Je suis sûr que sur les deux prochaines années avec des politiques budgétaires efficaces, on peut les atteindre. Mais, est-ce qu’on est en mesure de mettre en place une politique budgétaire efficace? », s’est-il interrogé.
Avec la moralisation de la vie publique initiée par les autorités de la transition, n’est-ce pas une mesure pour sécuriser ces ressources? « Tant que nous ne voyons pas la part des entreprises publiques, les établissements industriels et commerciaux dans le budget, on ne peut pas dire qu’on est en train de faire quelque chose. Tant qu’on ne voit pas quelques lignes budgétaires qui ne veulent rien dire encore dans l’assise budgétaire, on ne peut pas dire qu’on est en train de bien faire. Donc, il y a beaucoup de choses que l’on peut faire pour dire qu’on est en train de faire une discipline budgétaire« .
Avant de terminer, il conseille de ne pas compter sur l’aide extérieure qui peut être suspendue à tout moment.
« L’aide extérieure, c’est tout le monde en mouvement, il faut faire très attention. Vous avez vu ce qui se passe au Niger où on a suspendu tout. Qui vous demain que ce qui est promis ne sera pas suspendu en Guinée. C’est pourquoi je dis qu’il ne faut pas compter sur l’extérieur. Il faut compter sur soi-même« , a-t-il indiqué.
Mamadou Aliou Barry pour guinee114.com
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