Comme pour les investissements dans le domaine de la bauxite, le méga-projet d’exploitation du minerai de fer du Simandoupermettra certes à notre pays d’avoir des ressources propres, lui permettant de soutenir son développement économique et social. C’est dans ce cadre que la République de Guinée, à l’instar d’autres pays, entend amener les projets miniers à soutenir le développement agricole de notre pays.
En parlant d’agriculture, ici, je relève le maintien et le renforcement des activités des populations du corridor minier, afin de permettre à notre pays de converger vers la production intensive de produits agricoles, lui permettant de subvenir aux besoins primaires des populations et d’aspirer à l’augmentation de son PIB, à travers l’exportation intensive de produits agricoles de rente, comme le souligne le célèbre économiste John Hartwick, à travers sa règle sur le développement durable.
Nous savons que selonles récentes études, 60% des populations guinéennes vivent en zones rurales et elles ont pour activités essentielles l’agriculture, l’élevage, l’agroforesterie et la pisciculture. Le projet Simandou va déplacer des grandes zones de production agro-pastorales et forestières, les villages sur le long des 670 km de chemin de fer à construire, sans oublier son impact sur la pêche côtière à travers le port.
L’expérience dans l’exploitation de la bauxite en Guinée a montré qu’à part l’Etat, les populations n’ont pas réellement bénéficié des projets miniers dans leur localité. C’est pour cette raison qu’il y’a d’ailleurs souvent des soulèvements et conflits avec les sociétés minières.
Comment faire autrement avec le projet Simandou ?
La relance du projet Simandou par les autorités de la transition est un acte salutaire qui permettra de faire de notre pays le premier exportateur du minerai de fer du monde. Avec un investissement total de plus de 15 milliards USD, dont près de 10% seront consacrés à l’amélioration des conditions de vie des populations dans les zones impactées par le projet, il faut savoir que le projet Simandou permettra la construction d’un corridor de 670 km de chemin de fer qui traverse toute les quatre régions naturelles du pays, la construction d’un port en eau profonde et l’extraction de près de 100 millions de tonnes de minerai de fer/an, pendant 40 ans.
Pour ce faire, le Gouvernement devra être aux côtés des populations des zones impactées,appelées à se réadapter et à se réinventer, pour permettre et maintenir un développement soutenable.
Avec à la tête de ce projet de classe mondial, les deux plus grandes sociétés en termes d’exploitation minières et de transport de minerai, Rio Tinto et WSC, la République de Guinée peut capitaliser sur la grande expérience de ces deux géants pour amorcer sont développement agricole. Des aménagements hydro-agricoles pourront être faits tout le long du chemin de fer, afin de permettre aux populations riveraines de continuer à exercer leur activité d’exploitation agro-pastorale de façon intensive, car plus besoin d’attendre la saison des pluies pour produire. Ce qui multipliera par deux voire trois ou quatre le rendement agricole, car les aménagements permettent de produire plus, et plus souvent bien entendu à la clefun enrichissement net des populations impactées.
Les accords sur l’exploitation des minerais, du chemin de fer et du port en eau profonde sont très bénéfiques pour l’économie de notre pays, mais la programmation rationnelle de l’investissement réservé à l’amélioration des conditions de vie des populations impactées par ce projet pourrait sans doute permettre à la Guinée et aux Guinéens de créer le célèbre diagramme de Venn sur ce modèle économique. Donc, converger vers le développement durable.
Nous pourrons ainsifavoriser, à travers la mise en place de baux, l’investissement agricole. Donc, la production intensive de produits agricoles et la création de grandes fermes tout le long du corridor et ainsi bénéficier de l’exploitation du chemin de fer et du port en eau profonde.
Savez-vous qu’avec 5 000 ha de terres aménagées, la République de Guinée peut produire, par exemple, avec des variétés hybrides de riz, jusqu’à 3 fois par an pour une récolte de 7 à 8 tonnes à l’hectare, soit au moins 70 000 tonnes de riz paddy par an. Ce qui correspond au quart du besoin d’importation de riz pour notre pays !
Mme Gnalen OULARE,
Economiste,
Consultante, spécialiste des questions de développement rural
Ancienne Conseillère Technique à la Présidence de la République en charge du développement rural