“L’autisme n’est pas une maladie, encore moins une malédiction ou signe de possession et de sorcellerie. Beaucoup d’enfants et de mères d’enfants autistes en Guinée souffrent de cette stigmatisation. Nous savons tous que dans notre société patriarcale, l’échec d’un enfant est attribué à la mauvaise mère qu’il a eu alors que lorsqu’il réussit, on attribue cela au père.” : nous confie Fatou, âgée de 32 ans et maman de trois garçons dont l’ainé de six (6) ans est autiste.
L’autisme est un trouble du développement d’origine neurologique qui se manifeste principalement par une altération des interactions sociales et de la communication et par des intérêts restreints et répétitifs. Ces troubles peuvent provoquer un comportement inadapté dans certaines situations sociales.
Plusieurs enfants à travers le monde reçoivent des diagnostics de Troubles du Spectre de l’Autisme, mais en Guinée, la méconnaissance de ses symptômes précoces rende quasi inexistant son diagnostic. En effet, il n’existe aucune politique nationale de prise en charge de ce type de troubles et le pays ne dispose d’aucun spécialiste pour l’accompagnement de ces enfants. Ce qui devrait peut être interpeller les nouvelles autorités dans le cadre des différentes filières de formation.
Malgré la richesse du pays en matières premières et l’aide des partenaires au développement, beaucoup reste à faire pour combler un déficit criard d’infrastructures et d’expertise pour améliorer le secteur médical en Guinée.
Fatou rajoute : « Les troubles du comportement chez les enfants autistes sont souvent mal compris. Ce qui les exposent à des préjugés socio-traditionnels les assimilant à des esprits maléfiques, des enfants sorciers, possédés ou réincarnant le diable. Et parfois, nous sommes abandonnés par nos familles sous la pression du regard de la société. Nous avons beaucoup de mal à donner à nos enfants une éducation de qualité. Les écoles ne sont pas inclusives et il n’existe pas d’institutions spécialisées. Or, du fait de la condition qui les caractérisent, ils n’ont pas les mêmes facultés de compréhension que les autres enfants. »
À ce jour, à part quelques psychologues et des psychiatres, la Guinée ne dispose ni d’orthophoniste, ni de psychomotricien encore moins d’ergothérapeute ou de thérapeutes ABA qui représentent les disciplines essentielles pour une prise adéquate de ces enfants.
Considérant l’autisme comme une tare, les enfants du spectre ainsi que leurs mères subissent des pressions psychologiques au sein même de leurs familles. Ils sont rejetés, humiliés , voire tout simplement éliminés pour préserver la bonne image car considérés comme une honte et la cause de plusieurs maux pour leur entourage.
Fatou pour finir : « Plusieurs familles font recours à des charlatans ou se basent sur des mythes pour éliminer tout ceux qu’elles considèrent être mystiques. Les autorités devraient être plus réactives lorsqu’une victime dénonce ces pratiques d’une autre époque et demande leur protection afin d’échapper à ses persécuteurs .»
A noter que rares sont les mères d’enfants autistes à avoir le cran de Fatou d’évoquer les difficultés qu’elles rencontrent dans la société à cause de leurs enfants sans crainte de représailles.
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Ousmane Diakité