Ange pour les uns, démon pour les autres, pour paraphraser cet auteur réputé de la France du célèbre Richelieu, nous osons dire, avec quelques réserves, que : « Ahmed Sékou a trop fait de mal, pour qu’on en dise du bien, et trop de bien, pour qu’on en dise du mal. » Pour de jeunes étudiants nés et ont grandi sous d’autres cieux, à l’époque, Sékou Touré était le sauveur de l’Afrique, le Messie envoyé pour guider les peuples du continent noir.
Certains de ces jeunes passaient des heures et des heures à se gaver de ses grandes théories sur tous les sujets. Il les abordait avec une telle aisance que ces jeunes étaient, tout simplement, séduits par la musicalité des mots qui résonnaient dans ses discours. Sur le plan africain, il faut oser l’avouer, Sékou Touré était un Ange, un combattant pour la libération de l’Afrique du joug colonial.
La Guinée était le centre de l’Afrique combattante, le pays qui a abrité de nombreux panafricains pourchassés pour leur idéologie, leur aspiration légitime au bien-être des africains. Ce combat ne pouvait, malheureusement, que nuire au colonialiste dont les intrigues, prouvées, porteront un coup sérieux aux ambitions du président Ahmed Sékou Touré. En Guinée, l’on avait une autre perception de toute cette mise en scène qui voilait le vrai visage d’un dictateur. Le système implacable installé par le régime politique, avait fait de la Guinée un enfer pour les guinéens, tant la délation avait conduit des milliers de citoyens à la potence ou aux lugubres prisons dont la plus célèbre était le camp Boiro. Le bagne de la Guinée ouvert à l’élite guinéenne.
S’il est vrai que les complots étaient une réalité, serait-il aussi vrai que tous ceux qui ont été liquidés pour complot, étaient coupables ? La révolution de l’orgueilleuse pauvreté avait fini par engloutir la plupart de ses enfants, même ses concepteurs. Pace qu’il faut révéler que les victimes de la révolution étaient de plusieurs ordres, il y avait de pauvres innocents accusés de complots, alors qu’il en était rien. Il s’agit de commerçants, d’étudiants, de paysans, de simples citoyens. Il y avait des anciens dignitaires, serviteurs de la révolution, dont certains avaient occupé des postes de responsabilité importants, anciens ministres, anciens responsables politiques etc…Il y avait aussi des expatriés, victimes de délations, ou de simples soupçons, arrêtés, emprisonnés et liquidés.
A ceux-ci, s’ajoutaient de nombreux exilés. Que de sacrifices sur l’autel de la folie humaine ! Aujourd’hui, les héritiers de la révolution, ceux qui auraient dû répondre des crimes de leur parti unique, veulent fêter l’anniversaire de la période la plus sombre de notre Histoire, en tentant d’immortaliser le responsable suprême du retard de la Guinée. Et dire que l’une des victimes de ce régime, qui avait choisi l’exil, est aujourd’hui au pouvoir en Guinée. Alpha Condé n’aurait-il pas commis l’erreur d’avouer qu’il prend la Guinée là où Sékou Touré l’a laissée ? Le paradoxe est guinéen. Peut-être qu’un jour, les enfants des victimes du camp Boiro commémoreront, avec éclat, la liquidation de leurs parents. Que ce serait de bonne guerre !