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Procès du 28 septembre : « Tiegboro a juré de nous faire périr en prison », déclare une partie civile

Comme prévu, le procès des événements du 28 septembre 2009 a repris ce mardi 03 octobre 2023, au tribunal de première instance de Dixinn délocalisé à la Cour d’appel de Conakry. Après l’ouverture de l’audience, c’est Mamadou Kaly Diallo, activiste des droits de l’Homme, membre de l’organisation DSV-BI (Démocratie Sans Violence-La Baïonnette intelligente), qui a été appelé à la barre.

Dès sa prise de parole, cette partie civile a prié pour le repos de l’âme des disparus, avant de rendre un vibrant hommage au feu Thierno Madiou Sow, ancien président de l’OGDH (Organisation guinéenne des droits de l’Homme et du citoyen). Ensuite, il a expliqué la souffrance qu’il a vécue après les événements du 28 septembre, suite à son engagement dans le combat visant à réclamer justice pour les victimes et à mettre fin à toute forme d’exaction en Guinée.

« Après les événements du 28 septembre, le 28 octobre plus précisément, nous, un groupe de jeunes épris de paix et de justice, nous avions pris l’initiative sur nous-mêmes, à travers le respect de toutes les procédures y afférentes, d’organiser une grève de la faim pour demander l’arrêt des exactions contre le peuple de Guinée et l’organisation d’un cadre de dialogue sincère pour une sortie de crise. Un mois jour pour jour, nous sommes venus de façon volontaire, à la Maison des jeunes de Dixinn, où nous avons entamé une grève de la faim de 5 jours, organisée par la Fédération des associations de jeunes. Nous étions au nombre de 7.

 Aux environs de 00 heure, de façon très brutale, avec une violence que vous ne pouvez pas imaginer, avec des injures que je ne peux pas répéter, j’ai vu le colonel Tiegboro venir avec ses hommes dans deux pick-up. Avant de venir, ils ont sorti un nombre important d’habitants du quartier, qui étaient dehors. Il nous a exposé avec une humiliation qui ne dit pas son nom, avec des matraques, avec des menaces, il a dit que nous allons périr. Avant de nous embarquer, Colonel Tiegboro a juré de nous faire périr en prison. Il nous a qualifiés de terroristes.

 Aux environs de 00 heure, nous sommes arrivés au camp Alpha Yaya, département anti-drogue. Il a fait sortir des caméras. Il nous a dit qu’on va tous périr. Il a envoyé des boîtes de conserve et du pain, on nous a alignés, on prend le pain, on est en train d’être filmés. Il nous a dit de choisir : soit on mange ou on reçoit 100 coups de fouets. Après, il nous a jetés dans un conteneur obscur.

Aux environs de 2 heures du matin, ils sont venus nous faire sortir un à un pour nous poser des questions : qui vous finance ? Vous agissez au nom de qui ? Nous avons répondu que nous agissons dans le cadre de la promotion de la non-violence. Nous n’avions que des banderoles et de l’eau. Tout ce qui est torture, humiliation, et surtout la peur, le colonel Moussa Tiegboro Camara nous a infligés.

Aux environs de 7 heures, on m’a envoyé dans une cellule où il y avait des narcotrafiquants, en me déshabillant dans une salle climatisée. C’est un narco présumé qui m’a passé son téléphone, j’ai appelé l’OGDH, j’ai donné nos noms. Quelques heures après, la FIDH et le gouvernement français, sont intervenus. Quand le colonel Tiegboro a compris que nous ne sommes pas anodins, il a ordonné qu’on nous envoie à l’hôpital Ignace Deen. Vers 17 heures, il y a eu l’arrivée du colonel Jacques Touré qui était chargé des questions de défense à la Primature. Il a tout fait mais les hommes du colonel Tiegboro n’ont pas obéi à ses ordres.

 Il a fallu l’arrivée de Dr Koutoubou Sanoh, qui nous a présenté des excuses au nom du gouvernement, pour qu’on puisse baisser nos têtes, sinon on était obligés de regarder le soleil. Finalement, vers les 23 heures, il nous a invités dans un restaurant qui était au pied du pont 08 novembre. Après, il nous a pris pour nous déposer au camp Alpha Yaya Diallo, où on était censés rencontrer le capitaine Moussa Dadis Camara, en vain. C’est ainsi qu’on nous a laissé rentrer à la maison », a relaté Mamadou Kaly Diallo.

Selon cet activiste des droits de l’Homme, il a été obligé de s’exiler à Dakar pour sauver sa tête. Aujourd’hui, il réclame « justice et réparation ».

                   Diop Ramatoulaye 
                      666-75-16-10 

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