Conakry- Les agressions sexuelles sont devenues un problème réel de santé publique. Les femmes et les filles sont victimes de violences conjugales, violences en milieu de travail, d’harcèlement sexuel et de viol.
Selon une étude réalisée par l’Unfqe, 80% des femmes sont victimes de violences conjugales et les agressions sexuelles représentent plus de 30% des consultations de victimologie en médecine légale et 70% de ces victimes ont moins de douze ans.
Pour tenter de trouver des solutions à ces problèmes de sociétés, la Guinée abrite depuis ce matin le premier congrès international de la Société Guinéenne de Médecine légale et de Santé et Sécurité au travail. Pendant deux jours, des experts Guinéens et leurs confrères venus du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, du Burkina Faso et du Niger vont se pencher sur la problématique de la prise en charge des violences sexuelles et la santé et sécurité au travail.
À l’entame, une minute de silence a été observée pour le repos de l’âme de toutes les victimes de violences basées sur le genre.
Selon les organisateurs, ce congrès s’articule autour de trois axes: la problématique de la prise en charge des violences sexuelles en Guinée, la prévention des risques professionnels en milieu de travail et le covid-19 en milieu de travail.
Pr Hassane Bah, médecin légiste, président de la Société Guinéenne de Médecine légale et de Santé et Sécurité au travail a expliqué les conséquences des violences sexuelles sur la vie des femmes.
« L’âge prépubère de ces enfants les expose à des complications anatomiques, des déchirures, des fissures recto-vaginales mais aussi des complications infectieuses, bactériennes et virales y compris le VIH. Cette violence met en péril la santé, la dignité, la sexualité, la sécurité et l’autonomie de ces victimes. Face à cette situation que devons-nous faire ? Le présent congrès répond à ce devoir avant tout humaniste où chaque citoyen, organisation de la société civile, magistrat, médecin légiste, officier de police judiciaire doit jouer sa partition », a t-il indiqué.
Et d’ajouter: « Une étude réalisée en Guinée sur la corrélation entre les conclusions médico-légales et les décisions de justice nous a permis de constater que moins de 10% des auteurs d’agression sexuelles étaient jugés devant la cour d’assise. Hélas les 90% ont été libérés au motif: arrangement à l’amiable, classement sans suite, désistement ou intervention d’une tierce personne. Le présent congrès est une occasion d’échange et de réflexion sur les meilleures attitudes et pratiques d’une application correcte des peines conformément aux dispositions du code pénal pénal ».
De son côté, Dr Lamine Yansané représentant du ministre de la Santé s’est réjouit de la qualité des congressistes qui, dit-il, apporteront une contribution significative pour la gestion des violences sexuelles. Il dit espérer que ces échanges entre experts vont permettre à la Guinée de mettre en place une bonne politique de prévention des agressions sexuelles et des risques professionnels en milieu de travail.
Présidant la cérémonie d’ouverture de ce congrès de deux jours, Dr Dansa Kourouma, président du CNT s’est dit préoccupé par la montée en puissance des violences basées sur le genre en Guinée.
« Je suis préoccupé par la montée en puissance de la violence sous toutes ses formes dans notre pays, les viols sur mineurs, les violences contre les femmes, les accidents de travail et les maladies professionnelles. Mais ce qui me dévaste le plus c’est la banalité par laquelle ces problématiques sont traitées dans notre pays. Mais entre horreur et frustration, je place le curseur au niveau de notre responsabilité commune.(…). Tant que nous n’améliorons pas les mesures diagnostiques pour dénoncer les violences, les indices de viol avec précision, les innocents se retrouveront en prison et les coupables se promèneront dans la ville. La meilleure façon de le faire, c’est avec responsabilité de faire en sorte que le médecin légiste soit en capacité d’avoir les moyens techniques, technologiques pour pouvoir détecter les cas de viol. Ceci permettra d’avoir des indices claires pour appréhender les coupables et les traduire devant les juridictions de notre pays », a t-il suggéré.
En terme de perspectives, la société Guinéenne de Médecine légale et de Santé et Sécurité au travail envisage la création d’un institut de médecine légale avec un service de victimologie et un laboratoire, renforcer la formation des médecins légistes et procéder à une décentralisation de la médecine légale à l’intérieur du pays.
D’ors et déjà, Dr Dansa Kourouma a pris l’engagement au nom du président de la transition que cet institut tant voulu par les professionnels sera une réalité pendant la transition.
Diop Ramatoulaye
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