Les débats se sont poursuivis lundi devant la Cour de Répression des Infractions Économiques et Financières dans le dossier concernant la société Électromatic-Guinée. Comme prévu, les deux parties civiles, Mohamed Fawaz et Ali Fares, ont comparu devant la CRIEF pour donner leur version des faits dans l’affaire qui les oppose à leur co-gérant Ali Jichi.
Dans cette affaire de présumé détournement de fonds et d’abus de confiance qui dure depuis plusieurs mois, Ali Fares, associé de Electromatic-Guinée et résidant à Beyrouth, au Liban, a expliqué qu’il reproche à Ali Jichi de faire de la concurrence déloyale à Electromatic en travaillant pour l’entreprise familiale (qui est une entreprise de construction) et en même temps pour Electromatic-Guinée (qui vend du matériel électrique) ; et qu’il ne pouvait donc plus lui faire confiance. Ce doute a été suivi d’un audit, dans lequel apparait un virement effectué de la part de l’entreprise familiale de Ali Jichi mais qui n’apparaissait pas dans les livres de Electromatic.
L’affaire tourne autour d’un montant de 26 milliards de francs guinéens, transféré des comptes de Ejico vers Electromatic-Guinée, qui visait à booster l’entreprise Electromatic-Guinée qui, selon l’accusé Ali Jichi, était en faillite au moment où il prenait sa commande.
À la question de l’avocat de la défense qui a demandé si ce virement reçu était en contrepartie d’une prestation effectuée par Electromatic-Guinée, le plaignant a répondu par la négative. L’avocat de la défense a insisté sur le fait que cet argent appartient donc à l’entreprise familiale de Ali Jichi qui a fait le virement. « Non » a rétorqué la partie civile. Car dit-il, cet argent est sur un compte bancaire de Electromatic-Guinée.
Concernant la concurrence déloyale, l’avocat de la défense a demandé au plaignant s’il est normal que M. Fares qui est associé soit également fournisseur de Electromatic-Guinée. En réponse, M. Fares a expliqué que, même s’il est associé, le fait de vendre de la marchandise à Electromatic en tant que fournisseur est tout à fait normal.
Sur l’objet de la plainte pour détournement et vol, l’avocat de la défense a demandé à M. Fares quel préjudice Ali Jichi avait-il fait subir à Electromatic-Guinée. Le plaignant a expliqué qu’il ne le sait pas ; mais qu’il reproche à Ali Jichi d’avoir fait de la concurrence déloyale à Electromatic, en détournant un contrat de rénovation au profit de son entreprise familiale.
Après plusieurs convocations, Mohamed Fawaz, qui se trouve être un ami de longue date du père d’Ali Jichi, a pris la parole devant la barre pour raconter l’histoire de la relation entre leurs deux familles et la manière dont Ali Jichi est entré en relation avec Electromatic Guinée. Il a expliqué que Ali est le fils de son meilleur ami et a souligné l’importance de leur amitié de 47 ans. Mohamed Fawaz a révélé qu’il avait ouvert la société Electromatic Guinée et avait fait venir son neveu du Canada pour l’aider dans les affaires. Cependant, déplore t-il, ce neveu a mal géré l’entreprise. Ce qui a conduit à la décision de fermer l’entreprise.
À ce moment-là, le père d’Ali serait intervenu, en demandant à Fawaz de laisser son fils de gérer la société avec les ressources restantes. Fawaz a accepté et a employé Ali Jichi comme salarié. C’est ainsi qu’un inventaire a été fait.
« Lors de l’inventaire de la société, nous avons constaté la présence d’un montant d’environ 1 million de dollar. Ali Jichi m’a fait remarquer que cette somme ne pourrait pas être réalisée à ce prix, compte tenu des activités précédentes de l’entreprise qui incluaient la vente de carreaux, de quincaillerie et de matériels électriques. La société était un mélange de plusieurs activités. C’est ainsi que nous avons convenu d’établir le montant de 700 mille dollars », a fait savoir Mohamed Fawaz.
Contrairement aux déclarations de Ali Jichi, qui dit avoir hérité d’une entreprise qui était au bord de la faillite avant de la redresser, Mohamed Fawaz a affirmé que la société n’était pas en faillite, car il en était le gérant. Il a souligné qu’il aurait personnellement réglé toutes les dettes s’il y en avait eu. Selon lui, les allégations de Jichi selon lesquelles il aurait pris une entreprise en faillite étaient donc infondées. Il a clairement indiqué que si des dettes étaient dues, cela ne relevait pas de la responsabilité d’Ali Jichi.
« Quant aux allégations selon lesquelles Ali Jichi aurait pris possession d’une société en faillite, je tiens à préciser que la société n’était pas en faillite, car j’en étais le gérant. Si j’avais des dettes envers quelqu’un, cette personne serait venue me les réclamer et cela ne concernerait en aucun cas Ali Jichi, qui était mon employé à l’époque ».
La collaboration a pris une tournure significative en 2018 lorsque le père de Ali a approché Fawaz pour demander la participation de son fils dans le capital de la société. Fawaz a répondu en lui offrant « généreusement » 29% des parts de l’entreprise, sans aucune contrepartie financière. De plus, Fawaz a décidé de donner 20% des parts à Ali Fares afin d’alléger son propre fardeau, selon lui.
Les débats ont duré toute la journée. Selon la défense de l’accusé, le présumé détournement du montant de 26 milliards n’a pas pu être démontré par les plaignants à cette audience. Mohamed Fawaz et Ali Fares ont plutôt reproché à Ali Jichi d’avoir lésé la société Électromatic-Guinee dont il était le gérant au profit de l’entreprise de son père.
Alors que Mohamed Fawaz était à la barre, le juge Kova Zoumanigui a renvoyé l’audience au 26 juin 2023 pour la suite de l’audition des débats.
Diop Ramatoulaye
666-75-16-10