Cyber-arnaque, une réalité aux préjudices considérables !

Près de 8 milliards GNF par an de préjudices pour le compte de la cybercriminalité en République de Guinée. Ceci est le résultat d’une enquête menée par ma personne auprès de la division en charge de la cybercriminalité de la Direction de la police judiciaire, des services mobile-money et de la population. Ladite enquête avait pour objectif d’évaluer la progression des crimes liés aux supports et technologies numériques entre 2010 et 2022 mais aussi d’évaluer le préjudice causé par ces crimes aux paisibles citoyens et utilisateurs des services de la téléphonie et d’internet.

Une problématique bien diagnostiquée est mieux résolue !!!

La loi L-2016-037-AN relative à la cybersécurité et la Protection des données à caractère personnel qualifie de cybercrime, toutes infractions pénales commises par le biais d’un réseau de télécommunications ou d’un système d’information. Ces crimes vont des infractions classiques de droit commun commises sur ou par le biais des systèmes et équipements informatiques et électroniques tels que : le vol, l’escroquerie, l’extorsion de fonds(cyber-chantage), le blanchiment de capitaux… au cyberharcèlement.

Les infractions les plus fréquentes d’après l’enquête sont : le cyber-escroquerie via les réseaux sociaux qui se résume par le piratage et la prise de contrôle d’un compte dans le but d’escroquer les proches et les soutirés de l’argent ; le cyber-chantage (extorsion de fonds via les systèmes mobile-money pour la grande partie) et en dernier ressort le cyberharcèlement qui se résume par le harcèlement en ligne via commentaires d’internautes, montage d’images ou vidéos…les taux sont ci-après :

  Extorsion de fonds/Cyber-Chantage 61,7% +5 milliards en Préjudices

  Cyber-escroquerie/escroquerie en ligne 37,2% +3 milliards en préjudices

  Cyberharcèlement/Harcèlement en ligne 1,1%

Pour cause d’absence de données utilisables, les infractions liées à la diffusion de propos et contenus à caractère raciste et ethnique n’ont pas pu être prises en compte dans l’enquête, malgré leur hausse remarquable ces derniers temps en République de Guinée particulièrement en temps d’élections.

Les données de mon enquête révèlent ensuite une hausse de +100% pour la plupart de ces infractions entre 2010-2022 ce qui s’explique par une augmentation en moyenne de 8% du taux de pénétration de la téléphonie et de 1,5% pour internet ces dix (10) dernières années. Pour preuve, le taux de pénétration actuel de la téléphonie est autour de 114% et +50% pour le taux de pénétration d’internet. En somme, l’accès facile à la téléphonie et aux services internet favorisent considérablement la commission de ces infractions. Quelles solutions pour lutter contre ces crimes ?

La création d’une agence chargée de mener la politique de lutte contre la cybercriminalité fut une excellente initiative du pouvoir public de l’époque. Qu’en-est-il de la stratégie ?  Je crois qu’il est temps d’élaborer des stratégies nationales de lutte contre la cybercriminalité qui reflètent la réalité guinéenne. A lire les précédentes stratégies, on constate toute suite la non-conformité avec la réalité des internautes et usagers en Guinée. Chose qui pourrait s’expliquer par l’absence d’études et d’évaluations axées sur ladite problématique afin d’une intégration de ces dernières dans les stratégies nationales qui déterminent les moyens et démarches à adopter pour atteindre les objectifs de lutte.

En plus des études et évaluations à mener, il est important de sensibiliser les internautes et utilisateurs sur les risques et moyens de protection. Il faut aussi une adoption de la loi L/037 aux réalités actuelles (Amendements). Force est de constater un changement considérable de l’environnement du numérique et d’internet entre 2016-2022 avec l’intégration de nouveaux outils et systèmes.

En plus des messages de sensibilisation sur les risques d’extorsions via Orange Money à féliciter, il est important de mener une politique d’ensemble de lutte et matérialiser celle-ci par la mise sur bien de dispositifs et infrastructures efficaces à cet effet.

Mamadi Kaba

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